Les Alpes sont un peu partout : États-Unis, Japon, Australie, Scandinavie… et même sur la Lune ! Et puis, les JO d’hiver ne sont rien d’autre que l’exportation d’une idée alpine… dès 1932. Inversement, les Alpes accueillent le Monde : dans le massif, les noms de lieux évoquent le monde entier et reflètent le cosmopolitisme des touristes.
Cette conférence à deux voix fait alterner les deux termes du titre : les Alpes dans le monde et le monde dans les Alpes.
Xavier Bernierhttps://laboratoire-mediations.sorbonne-universite.fr/membres/bernier-xavier/ interroge le terme « alpin ».
L’utilisation de l’adjectif « alpin » est largement utilisé en dehors des Alpes pour qualifier des activités ou des éléments qui n’ont pas de lien direct avec les Alpes. Par exemple, le massif des Vosges communique sur ses « stations alpines » et la possibilité de faire du « ski alpin ». Sur le site de l’Ecole de Ski Français, il est utilisé le terme de « ski alpin » pour parler du ski de descente avec les pieds attachés aux skis.
Le mot « Alpes » viendrait d’un mot celtique composé de « Al » = haut et de « Pen » = sommet d’une montagne. « Alpen » serait un mot gaulois désignant les hautes montagnes. Il a été, par la suite, repris par la langue grecque et latine.
« Alpage » vient des prairies d’altitude où est mené le bétail. « Apinisme » évoque la conquête des sommets.
Différentes analyses de l’appropriation du terme « Alpes » et de ses dérivés permettent d’avoir une approche spiralaire.
L’analyse de la toponymie : c’est à dire des noms propres dans le monde
On utilise le mot Alpes pour désigner d’autres montagnes dans le monde = les Alpes australiennes, les Alpes de Transylvanie…
On retrouve dans les pays colonisés mais aussi en Europe ce terme pour désigner les sommets les plus élevés. En général, ce sont des voyageurs européens qui ont nommé ces hauteurs sans se référer aux noms locaux.
À l ‘échelle micro, on retrouve la toponymie liée aux Alpes dans les villes (exemple à Paris avec les rues des Pyrénées, des Alpes, du Mt Blanc…).
Par contre, actuellement, dans les stations alpines, on va chercher, pour les établissements haut de gamme (hôtels 5 étoiles par exemple), des noms qui évoquent d’autres lieux montagnards symboliques : Hôtel Pashmina, le Fritz ROY. C’est la cas à Val Thorens, Courchevel…
C’est une mise en scène pour l’ imaginaire touristique.
En revanche, les établissements de moyenne de gamme conservent les noms typiquement alpins : les Mélèzes, Les chamois..
Dans certains espaces, la part d’un tourisme particulier va entraîner une évolution de la toponymie de la station. Exemple : dans l’Oberland Bernois avec un développement d’un tourisme indien et la mise en place d’une signalétique, de restaurants et de services en hindi.
Le monde entre dans les Alpes avec le Kandahar. Cette dénomination (course, piste) est présente dans 9 stations. Son origine est intéressante : De l’Afghanistan aux Alpes : l’itinéraire d’un toponyme. La bataille de Kandahar, le 1er septembre 1880qui marque le fin de la seconde guerre qui oppose les Britanniques aux Afghans offre au chef des armées anglaises la reconnaissance de la reine Victoria qui le fait baron Roberts de Kandahar. Il fut vice-président du Public Schools Alpine Sports Club en 1903. Son nom est donné en janvier 1911, à une course de ski organisée à Crans-Montana : la Roberts of Kandahar Challenge Cup.
L’utilisation de l’imaginaire alpin dans les aménagements
Dans les stations de ski du Liban, on va trouver des infrastructures faisant référence directe aux Alpes. Par exemple, la station de Mzaar (touristes libanais et pays voisins) a une auberge suisse et un loueur de ski du nom de « Val Thorens ». La station est jumelée avec Courchevel.
Au Japon, même phénomène à Hokkaido : on trouve des chalets de type alpin (en bois) et des constructions d’inspiration alpine.
En Europe, au contraire, on voit se développer des structures avec des noms ou des sujets hors des Alpes : en Autriche, à Juval, le musée Messner présente la cultures tibétaines.
Les magasins Sherpa (magasins d’alimentation) sont largement implantés dans les stations alpines avec l’idée du sherpa = porteur dans l’Himalaya.
Faire / Savoir-faire / Faire-savoir
Faire et savoir-faire
Christophe Gauchonhttps://geoconfluences.ens-lyon.fr/a-propos/annuaire/gauchon-christophe évoque ces entreprises qui se sont développées et ont diffusé leur savoir dans le monde.
C’est d’abord à la grande entreprise alpine de transport par câble ; Jean Pomagalski installe, en 1936, le 1er téléski à l’Alpe d’Huez et en 1946 est créée la société POMAGALSKI.
Actuellement, elle revendique 8000 installations dans le monde (Europe, Asie, Amérique du Nord) et une évolution de l’utilisation des installations (déplacements miniers, touristiques, urbain).
On peut aussi citer l’entreprise Doppelmayr/Garaventa , société fondée en 1892. Les Usines principales se trouvent à Wolfurt (Autriche), et Goldau (Suisse) 15 600 installations dans 50 pays dans le monde.
Le style alpin
Quand on parle de pratiques des hauts sommets, il existe différents types d’ascension :
- l’ascension himalayenne = beaucoup de porteurs, de camps intermédiaires, grosse logistique.
- l’ascension « alpine » = légère, peu de camps intermédiaires, sans oxygène, peu de porteurs.
Enfin, pour qualifier la pratique sportive, on parle de ski alpin (pieds attachés, virage) que l’on différencie du ski nordique.
Des entreprises utilisent l’image des Alpes pour leur marketing.
AVLP (vente quasi exclusive en ligne) a choisi le chamois sur ses blasons et vante la qualité de ses produits créés dans les Alpes. Idem pour SALOMON.
Certaines activités réutilisent le matériel lié aux pratiques dans les Alpes pour leur marketing = exemple de l’utilisation d’anciennes télécabines dans des restaurants (Tarn et Garonne, Paris ou Dubaï).
Dans le champ politique
Xavier Berenier présente l’utilisation des termes liés aux Alpes.
- Création de labels internationaux comme Cimes, Station Verte, Green Globe, Labellemontagne qui permettent de diffuser une image de qualité des espaces et de l’accueil…
- Développement des AOP et du Mountainship project.
- Modèle de gestion des sites protégés copié par d’autres pays = la convention alpine qui s’exporte dans les Carpates.
Le monde politique se retrouve aussi dans les Alpes et en diffuse les images :
- ONU à Genève
- le CIO à Lausanne
- la réunion annuel du G8 à Davos.
- la FIFA à Zurich
On retrouve même sur la lune des noms donnés en lien avec les Alpes = Mt Blanc, vallée alpine…
Conclusion : cet exemple développé pourrait se faire de la même façon pour d’autres espaces = exemple, la Provence.