Paulin Ismard : l’esclavage dans les mondes antiques
L’ esclavage n’a pas permis l’éclosion du travail et dans les sociétés grecques et romaines, il n’ y a pas de notion de travail. Les activités productives et non productives, cela n’existe pas.
Dans la Grèce antique, les termes ponos, ergos pourraient faire allusion au travail. Il n’y pas le travail car cela suppose que c’est avant tout une société esclavagiste. Il n’y a rien qui distingue le travail de l’esclave de sa personne.
« Le capital » Marx : pour que le travail apparaisse, il faut identifier le travail du salariat et ce qu’il vend : sa force de travail.
Il y a un développement exponentiel à partir de Ve siècle avant J-C, c’est l’exploitation des esclaves : on appelle ça le louage d’esclaves, qui les utilise non pas pour le travailleur leur propre propriété mais pour les louer à des entrepreneurs sur une période donnée. L’esclave fait ainsi fructifier le capital. Dans ce contexte, le droit romain dissocie le corps même de l’esclave qui appartient au propriétaire et sa force de travail.
C’est dans la société esclavagiste qu’on voit apparaître la notion de travail. Les catégories du droit romain sont utilisées par les juristes du XIXe siècle pour mettre en place des contrats de travail.
Concernant la racialisation du travail, ce n’est pas envisageable pour les sociétés gréco-romaines. On a des préjugés sur des peuples étrangers, qui sont en dehors de l’empire mais cela ne se cristallise pas dans un discours sur la race (pas de catégorie de métier en fonction de la « race » : il n’y a pas de métier qui ne soit pas digne d’un esclave). La race est une création de l’histoire atlantique. Cela prouve bien le mépris à l’égard du travail et est considéré comme une activité digne d’esclave. En Grèce, n’importe qui peut être un esclave dès lors que l’on quitte sa cité. Certains esclaves peuvent travailler dans les boutiques des maîtres et la gère en leur nom pour masser des fortunes considérables et parfois, ils peuvent même donner des ordres à des libres.
Hayri G Öskoray : l’esclavage dans l’empire Ottoman
Dans l’Empire Ottoman, les esclaves côtoient les personnes d’autres statuts, ce qui inclue une coexistence. Quand on ne travaille pas à son propre compte, il y a toujours une subordination. Parmi les esclaves, il y a des condamnés du droit commun, des esclaves loués à des particuliers, des exemptions fiscales pour ceux qui font des travaux dangereux (ex : Mineurs). Il faut bien comprendre qu’il n’y a pas les esclaves d’un côté et ceux qui sont libres : il y a une graduation des statuts. Dans les galères, on trouve des esclaves, des condamnés de droit commun, des volontaires etc.
Concernant la racialisation et travail : il y a une dimension ethnicisée. Beaucoup d’esclaves sont étrangers « des infidèles capturés », on va faire des classements d’ethnies pour faire la schématisation des tâches pour les tâches dans lesquelles ils sont bons ou mauvais. Par exemple, les eunuques ne sont pas recrutés n’importe où, pour les travaux sexuels, on va préférer les femmes du Caucase), le but étant le profit qu’on peut en tirer. Recruter des travailleurs/esclaves étrangers est un moyen de s’assurer leur fidélité.
On distingue deux types d’esclaves : les esclaves du sultan et ceux des personnes privées. Les premiers peuvent mettre à mort leurs esclaves. Les seconds peuvent pratiquer des activités commerciales en son nom au même titre que les commerçants libres. Ils peuvent même acheter d’autres esclaves pour leur maître ! il y a environ 10 000 esclaves/an.
Pour ceux qui ont une petite ou grande fortune, cela n’est pas viable d’avoir des esclaves indéfiniment. C’est pour cela qu’on voit des affranchissements : on voit par-là une indistinction entre salariat et esclavage car les esclaves sont forcément libérés à terme.
Aurélia Michel : l’esclavage au Brésil
Qu’est-ce que l’esclavage fait au travail dans les Amériques ? Il procède d’une rupture car il extrait un individu d’une société et les rapports sociaux sont rompus. Dès la fin du XVIIIe siècle, on a envisagé de cesser l’esclavage et sont posées les questions du coût dans la société et de gérer l’après.
Concernant la racialisation du travail : une façon de perpétuer cette rupture de la société (par la race, couleur de peau etc.) Le travail libre doit beaucoup à l’esclavage. Certains maîtres travaillent sous les ordres de leur esclave si ce dernier est plus compétent que lui (dans l’artisanat notamment) : dans le cadre du travail précisément (cela ne renverse pas le rôle et la condition de chacun).
Les États-Unis ont aboli la traite mais avec un rapport à une population esclave différent par rapport au Brésil car la population esclave est y renouvelée sans cesse et la mortalité est élevée. Au Brésil, elle pratique la traite tout au long du XIXe siècle. L’esclavage n’est pas incompatible avec le travail : cela participe à sa productivité et à son évolution. Au Brésil, au moment de l’abolition, il y a tout une émancipation, et les planteurs se tournent vers une migration subventionnée pour recruter. Ce sont ces mêmes planteurs esclavagistes qui pensent en terme économique : nombre de travailleurs, nombre d’enfants, etc. Pour le travail des enfants, dès 10 ans, âge où les enfants sont considérés comme actifs et travailleurs, non pas comme enfants.
Le travail domestique conserve le plus grand héritage de l’esclavage et il n’est pas pris en compte.
Des historiens américains ont travaillé sur un 3ème esclavage avec le rôle de l’Amérique du Nord et ses sociétés esclavagistes (avec l’exploitation du coton dans les plantations et de la gestion de la main d’œuvre au sud).
Ce thème a été traité par la Documentation photographique : Esclavages – De Babylone aux Amériques