L’annonce récente mais non encore confirmée officiellement Au moment où nous écrivons ces lignes d’un allégement des programmes en terminales et en troisième peut être considérée comme une bonne nouvelle. Avec une annonce aussi tardive, c’est faire tout de même peu de cas d’un travail de préparation, souvent sur des questions assez pointues, qui se retrouve ainsi remis en cause. Considérons simplement de façon ironique, qu’un apprentissage n’est jamais perdu, et que nos collègues auront élargi leurs connaissances !
Ce qui est sans doute intéressant dans ces allégements réside dans la suppression de quelques études de cas dont le principe même mérite que l’on s’y intéresse.
Sur le terrain, dans le cadre de la classe, ces études de cas se limitent souvent à la présentation d’exemples, souvent les mêmes, que l’on cherche à faire rentrer à tout prix dans une problématique d’ensemble. Le bassin Caraïbe comme l’Afrique du Sud se retrouvent ainsi supprimés. Ces exemples servaient à introduire les notions de développement contrasté à l’échelle d’un État ou dans un environnement régional. Peut-être, sur ces études de cas, faudrait-il changer de perspective et présenter les questions à partir d’un fil conducteur qui serait illustré par des exemples.
Pour le programme de troisième qui était considéré comme totalement infaisable par les collègues, les allégements apparaissent comme assez peu significatifs, et pour ceux qui interviennent, notamment sur la guerre froide comme faussant la perspective historique.
Pourquoi par exemple avoir gardé Berlin et supprimé la guerre de Corée et la crise de Cuba ? Crise de Cuba qui a quand même mis le monde au bord de l’affrontement nucléaire et qui a été le paroxysme de la guerre froide. Il est vrai que les collègues avaient mal vécu que ces points soient tombés au brevet des collèges, alors qu’ils avaient fait partie des impasses inévitables et que l’inspection n’avait jamais reconnu «officiellement» que le programme ne pouvait être terminé.
Beaucoup d’interventions et de remarques ont été faites en juin dernier à propos des épreuves du baccalauréat et du brevet. Peut-être faudrait-il, et sans tabou, poser les différents problèmes qui ont été évoqués, remettre sur le métier la conception, la préparation des épreuves et les choix des sujets, en donnant plus de place à la constitution de groupes de travail. Mais encore faut-il que les participants à ces groupes de travail puissent en toute transparence être reconnus pour leur investissement, qui est, chacun le sait, non négligeable.
Au niveau des Clionautes, cela a déjà été affirmé, il n’est pas question de défendre une quelconque chapelle ou de maintenir des privilèges historiques liés à une quelconque ancienneté. Notre démarche est ouverte, en direction des associations de spécialistes, des organisations syndicales, et de tous les acteurs du monde de l’éducation qu’ils soient institutionnels ou non.
Nous souhaitons développer un dialogue permanent, et à cet égard, la liste de diffusion H français, liste modérée, installée durablement dans notre paysage, peut jouer son rôle.
Pour ce qui nous concerne, il est important d’agir et d’élaborer des propositions.
Commençons déjà, à l’instar de beaucoup de professeurs par remettre ces thèmes
Guerres / Totalitarismes, dans un ordre cohérent.
(La première guerre mondiale, la montée des totalitarismes, la seconde guerre mondiale, la Guerre Froide et la fin des totalitarismes.) Cela apparait comme bien plus logique et surtout donne un sens à la périodisation.
Nous tenons compte, bien entendu, de la réalité des contraintes, notamment des volumes horaires, sans pour autant nous en satisfaire.
Les enjeux d’une redéfinition des programmes d’histoire et de géographie, mais aussi de l’éducation civique, dans la mesure où cette matière est directement concernée par les annonces à propos de la morale laïque, vont très au-delà de nos disciplines.
Si l’on considère que nous jouons un rôle dans la formation citoyenne, nous devons aussi faire admettre que nos enseignements contribuent à l’élévation du niveau de connaissances des générations qui nous sont confiées. Cela devrait nous permettre d’éviter qu’à chaque rentrée, tel ou tel magazine ou auteur en mal de notoriété ne se répande en propos alarmistes, en réalisant un quelconque « coup éditorial ». Et cette rentrée ne fera pas hélas pas exception !
Nos disciplines méritent mieux, et la Cliothèque le démontre tous les jours, que des rééditions de vieux manuels même par des éditeurs prestigieux dont nous suivons le travail avec attention.
Parmi les questions qui sont également posées pour cette rentrée, il en est une à laquelle les Clionautes sont particulièrement sensibles, qui est celle du numérique. Nous avons été particulièrement attentifs au rapport d’étape sur le numérique à l’école qui a eu lieu ces derniers mois. Nous avons bien noté que les enseignements disciplinaires demeurent le pivot de la diffusion et de l’utilisation des technologies numériques. Nous sommes d’ailleurs en demande d’un bilan, en termes d’élévation des niveaux de connaissance et même de compétences, depuis que des plans informatiques, projets numériques, déploiement d’espaces numériques de travail, ont été mis en œuvre.
La question n’est pas d’utiliser ou non les technologies de l’information et de la communication, mais d’en disposer de façon ouverte et que celles-ci servent à la progression dans des apprentissages qui ne peuvent reposer – cessons la démagogie – que sur l’effort et le travail en classe et en autonomie. On l’aura compris, nous sommes hostiles à cette démagogie dé-responsabilisante visant à obtenir la suppression des devoirs à la maison.
Au rendez-vous de l’histoire de Blois, comme au festival de Saint-Dié, les Clionautes seront présents de façon significative. Attentifs aux évolutions de nos savoirs enseignés, nous y ferons entendre nos points de vue, sans autre préoccupation que de faire progresser « nos disciplines scientifiques et de formation ».
Bruno Modica
Président des Clionautes