CAPES d’histoire-géographie : la stagnation des postes, la perte des contenus disciplinaires, vient renforcer une tendance à la déqualification et à la précarisation de nos métiers.
La présentation en novembre 2019 d’un projet de réforme du concours de recrutement des enseignants a suscité beaucoup d’émotion de la part des associations de spécialistes.
Mise à jour avec l’arrêté du 25 janvier 2021
L’arrêté publié ce 25 janvier 2021, et qui suscite une émotion tardive de la part de ceux que je ne peux m’empêcher d’appeler « les carabiniers d’Offenbach », Vient confirmer les pires craintes que nous pouvions exprimer à ce propos.
En ce qui concerne le recrutement des professeurs, l’insistance sur les « postures » concernant les valeurs de la république et la laïcité, ne saurait tromper personne. Un discours convenu, préalablement formaté, permettra des recrutements de « répéteurs », et certainement pas de professeurs maîtrisant leur savoir, et capable de le transmettre.
Ce sont des capacités de s’approprier des contenus scientifiques, de les mettre à portée des élèves, qui doivent être évaluées de façon significative. Le recrutement « sur profil » auquel on assistera à partir de 2022 aura comme conséquence une déqualification significative des personnels ainsi embauchés.
Cela remet en cause aussi à terme « la liberté pédagogique » car il existera de fait un redoutable filtre lors de cet entretien qui permettra au jury, dont la composition serait d’ailleurs à commenter, de choisir des candidats dociles, ou qui auront eu les codes attendus pour rentrer dans le moule.
Dès que ces projets ont été connus, et cela ne date pas d’hier visiblement, nous avons effectivement alerté sur les conséquences. Le pôle universitaire des jurys semble reculer au profit de celui des inspecteurs, dont force est de constater qu’ils sont en situation de sujétion à l’égard de leur hiérarchie. Cela est loin de garantir leur indépendance.
Dans un contexte de ce type, nous ne pouvons que lancer un appel en direction des universitaires, qui seront très vite les premières victimes de cet appauvrissement des contenus, par la baisse du nombre de candidats, tant le métier de professeur dans le second degré est devenu peu attractif.
C’est la porte ouverte à des recrutements « hors-concours », une tendance qui se renforce depuis des années, et qui fait des contractuels des victimes, tant les dispositifs de formation mise en place se révèlent en réalité inadaptés et insuffisants.
Article 8
L’épreuve d’entretien avec le jury mentionnée à l’article 7 porte sur la motivation du candidat et son aptitude à se projeter dans le métier de professeur au sein du service public de l’éducation.
L’entretien comporte une première partie d’une durée de quinze minutes débutant par une présentation, d’une durée de cinq minutes maximum, par le candidat des éléments de son parcours et des expériences qui l’ont conduit à se présenter au concours en valorisant notamment ses travaux de recherche, les enseignements suivis, les stages, l’engagement associatif ou les périodes de formation à l’étranger. Cette présentation donne lieu à un échange avec le jury.
La deuxième partie de l’épreuve, d’une durée de vingt minutes, doit permettre au jury, au travers de deux mises en situation professionnelle, l’une d’enseignement, la seconde en lien avec la vie scolaire, d’apprécier l’aptitude du candidat à :
- s’approprier les valeurs de la République, dont la laïcité, et les exigences du service public (droits et obligations du fonctionnaire dont la neutralité, lutte contre les discriminations et stéréotypes, promotion de l’égalité, notamment entre les filles et les garçons, etc.) ;
- faire connaître et faire partager ces valeurs et exigences.
Durée de l’épreuve : trente-cinq minutes. Coefficient 3.
Le candidat admissible transmet préalablement une fiche individuelle de renseignement établie sur le modèle figurant à l’annexe VI du présent arrêté, selon les modalités définies dans l’arrêté d’ouverture.
Pour les sections de langues vivantes étrangères ou régionales, l’entretien se déroule en français.
Pour la section langue des signes française, le choix de la langue (LSF ou français) dans laquelle se déroule l’épreuve et l’adaptation éventuelle de la durée de celle-ci s’effectue dans les conditions prévues à l’annexe I pour la section considérée.
les conditions dans lesquelles se sont passées les épreuves en 2020 également, avec l’absence d’épreuves orales.
Des épreuves orales pour le CAPES !
Capes 2021 : la stagnation des postes
Le nombre de postes proposés aux concours était en 2020 de 566. Il sera de 552 pour 2021, les Clionautes ne peuvent que s’étonner de cette stagnation du nombre de postes. Surtout lorsque l’on sait que dans de très nombreuses académies le recrutement de contractuels se poursuit, y compris de façon choquante, comme dans l’académie de Versailles.
Pôle emploi : L’annonce indécente pour le collège de Samuel Paty
Pôle emploi, le bon coin, semblent devoir se substituer à court terme à un concours qui sera lui-même déclassé du point de vue des contenus disciplinaires.
La nouvelle version du CAPES pour 2022 est lourde de menaces
CAPES 2022 : la perte des contenus
Pour ce qui concerne le CAPES d’histoire et de géographie, les épreuves écrites d’admissibilité mettent au même niveau la maîtrise disciplinaire des candidats, avec un seul sujet. Pour une matière enseignée qui compte quatre périodes en histoire et deux champs disciplinaires en géographie (régionale et thématique).
La seconde épreuve écrite d’admissibilité consiste « à mettre le candidat en situation d’élaborer une séquence pédagogique à partir d’un dossier ».
Pour les épreuves orales d’admission dont « le poids sera majoré par rapport aux écrits par le jeu des coefficients ». Une « épreuve de conception et d’animation d’une séquence d’enseignement» sera associée à un oral d’entretien sur la motivation du candidat et sa connaissance de l’environnement et des enjeux du service public de l’éducation.
CAPES : les observations des Clionautes
Ce projet appelle de la part des Clionautes les observations suivantes :
- La dimension disciplinaire apparaît comme sacrifiée dans ce projet.
- Une seule épreuve sur quatre permettra aux candidats de faire valoir leurs connaissances de nos matières.
Pour la seconde épreuve de l’écrit, traitant de « l’élaboration d’une séquence pédagogique, avec utilisation d’une tablette ou d’un ordinateur ». Cela nous paraît également beaucoup trop réducteur. Le risque réside dans une utilisation de recettes pédagogiques toutes faites remettant en cause la capacité du professeur à les adapter aux situations d’apprentissage qu’il rencontre.
La seconde épreuve d’admissibilité sur l’élaboration d’une séquence pédagogique nous parait faire doublon avec la première épreuve d’admission revient encore sur cette compétence attendue. Cela conduit à minorer le contenu disciplinaire et la capacité d’analyse des documents évalués dans la formule actuelle.
Pour les épreuves orales d’admission la seconde épreuve d’entretien sur la motivation du candidat et sa connaissance de l’environnement et des enjeux du service public de l’éducation nous semblent ouvrir la voie à une forme de posture attendue.
Cela est incompatible avec la dimension critique que les savoirs apportent dans nos missions de transmission des connaissances.
j’apprécie très modérément les individualités qui s’expriment sous couvert d’anonymat, pour donner des conseils de ce type. Au risque de paraître condescendant, je répondrai simplement : « pourquoi voulez-vous qu’à 64 ans je commence une carrière de dictateur ? ». Plus sérieusement, j’assume parfaitement l’orientation que j’ai pu donner au Clionautes pendant près de 10 ans, avant de passer la main depuis deux ans. En l’occurrence, mon interlocutrice semble bien mal informée. C’est cette orientation que vous qualifiez de «main de fer», parfaitement démocratique et conforme au droit des associations d’ailleurs, qui a permis aux Clionautes de devenir la première association de spécialistes d’histoire et de géographie en termes d’effectifs, de visibilité, de reconnaissance et d’impact. Libre à vous de vous inscrire dans une logique de dénigrement à notre encontre, je pousse même l’amabilité jusqu’à publier votre commentaire qui n’a que l’épaisseur du trait. À ma connaissance, je ne pense pas vous avoir vue lorsqu’il a fallu mener des combats pour défendre nos disciplines, et dans ce cas précis défendre un concours qui est aujourd’hui vidé de sa substance avec les conséquences que l’on imagine. Informez-vous davantage, montrez-nous ce que vous faites, nous pourrons avoir certainement un débat plus enrichissant que celui de votre honteux commentaire que l’on pourrait trouver parfois nuitamment griffonné, sur certains lieux d’aisance.
Belle condescendance de M Modica qui gouverne toujours les Clionautes d’une main de fer, comme on l’appréciait il y a quelques décennies dans certaines contrées.. Ne faudrait-il pas laisser le trône? #okboomer
Quand on se livre à une attaque ad hominem, on prend la peine d’orthographier correctement le nom. Il s’agit de Modica, pas Monica.
Ensuite, monsieur Modica a enseigné devant élèves pendant 40 ans et continue à enseigner devant des publics variés. Pouvez-vous en dire autant?
Je tombe sur cet article aujourd’hui et surtout sur les commentaires qu’il a déclenchés.
Alors je pourrais revenir sur la condescendance de monsieur Monica, mais franchement, qualifier comme tel un agrégé, n’est-ce pas faire un pléonasme?
Car je pense que Billy, malgré ces fautes d’orthographe, apparemment disqualifiantes, pointe un réel problème. La quantité d’informations à ingurgiter et recracher dans un cadre méthodologique on ne peut plus normatif n’est certainement pas en cohérence avec la réalité des connaissances requises pour enseigner.
Bien sûr l’article a raison de pointer les dérives du concours qui, sous prétexte de pédagogie, vise surtout à recruter des professeurs exécutants et sans esprit critique. Bien sûr ces critères sont abjects et conduisent à rejeter les bons candidats au profit d’autres.
Mais franchement, comment ne pas faire le même reproche à l’évaluation du niveau « scientifique » de ces même candidats? En quoi avoir une capacité à rédiger 15 pages sur les subtilités de la relation capitale-provinces dans le cadre des cultes romains garantis-t-elle une bonne sélection?
Car à la vérité, le master MEEF manque surtout d’une chose: de la pratique. Envoyer, en seconde année, des apprentis professeurs devant une classe, sans que cette expérience soit contrôlée par un collègue expérimenté, est certainement la pire stratégie de recrutement.
Or, cette nécessité souffre tout autant du besoin viscéral du ministère de produire des professeurs dociles que des mandarins de l’université de justifier leur existence par l’exercice d’un magistère sur la préparation des enseignants.
En défendant les seconds, monsieur Monica ne fait rien d’autre que se complaire dans un conservatisme hors-sol qui mine notre éducation. Mais comment attendre autre chose d’un agrégé n’ayant certainement plus mis les pieds dans une salle de classe depuis des décennies?
« Quand je pense qu’un major d’agreg peut atterrir dans le 9.3! »
la logique voudrait que ce professeur d’exception, puisque major à l’agrégation, soit justement dans le 93, là où les besoins sont les plus importants. Ce qui est surtout inquiétant dans ce type de raisonnement, c’est que l’on puisse concevoir que la baisse du niveau des élèves induise automatiquement une baisse du niveau de recrutement des enseignants.
La baisse du niveau d’exigence semble générale, mais il y a deux façons d’agir. On peut commenter à l’infini, ou se donner les moyens d’agir sur le terrain.
Contrairement à ce que vous croyez, il y a eu une remise en cause du statut. Mais cela concerne les organisations professionnelles de type syndical.
Pour ce qui nous concerne nous considérons la baisse du niveau d’exigence comme un naufrage dont nous ne pouvons nous contenter.
Vu le niveau des élèves, je conçois la réaction de Billy, orthographe et syntaxe mises à part!
Quand je pense qu’un major d’agreg peut atterrir dans le 9.3!
Quant au nombre de postes: ils continuera à diminuer, car pourquoi s’encombrer de fonctionnaires inamovibles (et dont les retaites donnent des sueurs à Bercy) alors que des contactuels peuvent aussi bien faire l’affaire (pour bien moins cher) vu le public (on y revient toujours)!
Mais là les profs comme les autres fonctionnaires sont victimes de leur statut irréformable!
En effet l’Administration a une arme imparable: la mise en voie d’extinction!
A la lecture du message de BILLY, il faudrait sans doute que l’usage d’une bonne orthographe soit valorisé et de même pour la conjugaison……
J’ai conservé ce commentaire à l’argumentation un peu primitive en raison de la qualité de son expression et de son orthographe. Cela justifie sans aucun doute les probables échecs répétés de ce commentateur au concours.
Enfin!
Y en a marre de passé un concours qui n’a aucun rapport avec le metier!
« Dimension disciplinaire sacrifiée » pitier!
On passe un temps fou à se gaver d’une somme monstrueuse de connaissances pour ensuite le vomir sur des copies pendant 2×5 heures. Et que représente cette dite somme de connaissances pendant l’exercice du métier ? Une ligne, peut-être deux, dans un cours quelconque… 1 an = 2 lignes. Il est temps que ces conneries s’arrête !
Merci pour votre analyse. Néanmoins je trouve votre critique sans doute trop forte.
D’abord parce que les deux épreuves écrites proposées dans cette version semblent strictement identiques à celles proposées ces dernières années–et qui ont une réelle base disciplinaire et méthodologique forte.
Ensuite, et a priori, parce que la première épreuve d’oral ressemble beaucoup à la « leçon » (actuelle MSP).
La seule interrogation (à mes yeux) porte sur la dernière épreuve d’oral qui doit remplacer l’ ASP (épreuve avec dimension disciplinaire, épistémologique, didactique et portant sur des enjeux sociétaux) mais nous pouvons croire en l’intelligence de nos collègues qui auront à interpréter les consignes pour imaginer une épreuve dans laquelle ils pourront évaluer la connaissance du système éducatif, la motivation du candidat et la maîtrise de contenus disciplinaires.