Également sous-titré « L’espace retrouvé », ce symposium animé par Jean-François Thémines (professeur des universités à l’ESPE Caen) était l’occasion de présenter, de manière croisée, des expérimentations à chaque niveau d’enseignement, lesquelles avaient pour but de montrer que l’entrée par les acteurs est plutôt rare et que la dimension spatiale des approches est pourtant un bon moyen d’analyse et d’apprentissage d’une géographie où l’élève est le sujet.
De manière brève car les discussions lancées suite à ce moment d’échanges débutent à peine, nous pouvons préciser les thématiques abordées par chacun.
Professeur des écoles et doctorante en géographie à l’université de Lille 1, Maud Verherve a pu montre qu’à l’aide de « plis » et « déplis » dans la construction des savoirs, des élèves de primaire de quartiers populaires de Roubaix et Lille arrivaient à donner du sens à leurs visites de quartiers (en les rendant acteurs), à se faire une meilleure image de leur environnement proche et à en saisir l’histoire et la géographie.
Avec Maud Verherve, j’ai eu l’occasion de présenter un dispositif appelé « Ma petite géographie » visant à faire recenser par des élèves de primaire des lieux importants pour eux, les illustrer (avec texte et image, qu’elle ait été carte, photo, graphique ou autre) mais surtout de les classer en fonction du critère de l’échelle. Acteur mobilisé personnellement (chaque élève possède ses lieux) mais collectivement (trouver une méthode de classement a priori valable pour tout le monde), l’élève doit ainsi pouvoir saisir la complexité mais surtout la réalité de emboîtement scalaire dans lequel il évolue, ce que les programmes et les manuels ne permettent que difficilement en présentant les échelles de manière isolée.
Formatrice à l’ESPE Caen, Stéphanie Caillé s’est également penchée sur les élèves de l’élémentaire via deux étudiantes M2 Professeur des écoles ayant en charge, dans une classe de MS/CE1, l’enseignement de la découverte du monde, donc de l’espace. L’idée était de mobiliser une boîte tenant compte des représentations des élèves, étant elle-même une représentation des élèves et où le format même de la boîte constituait une invitation à l’imaginaire. Mobilisant tant l’intérieur que l’extérieur, les élèves ont représenté la ville comme un espace fonctionne, un espace vécu, un espace perçu mais aussi un espace organisé, social où les acteurs sont présents.
Professeur en lycée à Hérouville Saint-Clair, Nadège Dubois-Ecolasse s’est intéressée à faire « avec l’espace » dans l’activité scolaire lycéenne. Trois approches ont été présentées : celle du parcours où les élèves ont été amenés a représenter leur territoire après déplacement sur le terrain ; celle de l’espace scolaire où le cadre de travail a subi des modifications dans son agencement (salle de classe, parties communes ayant accueilli des expositions temporaires) ; celle de l’habiter ouvrant ici davantage la réflexion sur le partage de l’espace entre les différents membres de la communauté éducative où l’art de l’espacement de la négociation sont de mise.
Avec Anne-Laure Le Guern, formatrice à l’ESPE Caen, Jean-François Thémines a proposé un regard sur un genre nouveau, des portfolios d’étudiants en master entrant, pour tenter de saisir quel pouvait être leur « monde commun » (Arendt). Quatre manières d’approcher la spatialité de l’enseignant entrant dans le métier ont été abordées : le document élève (exemple : une carte mentale évaluant la pensée de l’élève), l’enseignant lui-même (ses positions, ses mobilités…une micro-échelle), l’environnement scolaire (via des déplacements) et enfin l’espace mobile, celui du voyage éducatif.
Enfin, Thierry Philippot, maître de conférences à l’université de Reims, s’est tourné vers les enseignants en poste pour détailler leurs différents espaces de l’activité didactique. Mettant bien en garde sur le fait que l’activité observée en classe (ici par vidéos et entretiens) n’est qu’un aspect partiel d’une activité plus large, Thierry Philippot a exposé les différentes temporalités de l’activité enseignante : le macrodidactique ou l’enseignant est dans une réflexion large, à domicile sur de grandes questions de fond, le mésodidactique correspondant au temps de la mise en séquences, en séances avec éventuellement une collaboration avec ses pairs et enfin le microdidactique constituant lui le temps du direct, du « faire classe ». L’ancrage personnel du goût de l’enseignant et de ses propres expériences spatiales semble prégnant chez des enseignants du primaire peu formés à la géographie.