Exposition « Destination finale, de notre dressing à l’océan » par la journaliste et photographe Isabelle Serro

 

Le musée du textile et de la vie sociale de la ville de Fourmies (département du Nord) accueille, du 04 février au 30 mars (entrée libre et gratuite), l’ exposition intitulée « Destination finale, de notre dressing à l’océan » basée sur le travail de la photographe et journaliste indépendante Isabelle Serro.

« Où vont les vêtements déposés dans les bacs à recycler ?  Une grande majorité arrive au Ghana. En quelques années, le pays est devenu la poubelle vestimentaire du monde occidental» écrit Isabelle Serro en guise de propos liminaire à son travail.

Ce petit pays de 35 millions d’habitants reçoit 15 millions de vêtements chaque semaine. A ce chiffre effarant vient très vite s’en greffer un autre : seuls 30 % de ces envois textiles pourront faire l’objet d’une revente ; les 70 % restants ne constituent plus qu’un ensemble de déchets dont le degré de pollution est absolument effroyable.

Après une rapide présentation d’un centre de tri français (celui de Bruay-la-Buissière. Il accueille chaque jour 60 à 65 tonnes de vêtements. Dans ce centre, 55 % des vêtements collectés prennent la route de l’exportation, essentiellement vers l’Afrique et notamment le Ghana), les premiers clichés exposés nous emmènent dans l’univers du marché de Katamanto. Celui-ci regroupe plus de 30000 vendeurs qui sont majoritairement des femmes. Activité d’une grande précarité, le recyclage des vêtements procure de maigres profits lorsque celui du transport peut parfois rapporter jusqu’à cinq dollars et se révéler des plus dangereux.
Les très beaux clichés réalisés montrent, pour certains, le désarroi de femmes victimes de l’épouvantable dureté du monde du textile de seconde main, le système D de celui qui utilise, alors qu’il recycle un vêtement, la « lampe » de son téléphone portable pour économiser sur électricité ou encore le séchage de jeans le longs de voies, vue quasi surréaliste, formant des haies de textiles entre les individus.

Les textiles invendables, exclus du marché de Kantamanto, sont déversés et forment de véritables tumuli de vêtements, de 20 à 30 mètres de hauteur (le cliché exposé sur l’affiche de l’exposition en forme un parfait exemple).
Certains de ces déchets textiles, avec la saison des pluies, se retrouvent emportés vers l’océan, provoquant de la sorte un véritable désastre environnemental. Une partie de ce textile forme des « tentacules » pouvant mesurer jusqu’à dix mètres de long avec des conséquences humaines désastreuses.
Les conséquences sur l’activité de pêche sont également évoquées (le Ghana, victime de cette pollution massive, importe désormais 60 % du poisson qu’il consomme), tout comme la précarité des femmes qui sont les premières à subir les conséquences de ces désordres.

L’exposition se termine par une présentation d’Agbogbloshie à Accra, l’une des plus grandes décharges au monde de rebuts high-tech.
L’enquête réalisée par Isabelle Serro est des plus impressionnantes. Elle ouvre une large piste de réflexion sur la surconsommation occidentale et plaide de manière efficace, par la justesse des textes et les très belles images réalisées, pour un changement urgent et définitif de nos comportements en la matière.