C’est à partir de trois textes littéraires que Pascal Clerc a réfléchi à l’ancrage et à l’absence de repères. Il s’est appuyé pour cela sur Epépé de Férenc Karinthy, 1970 ; le roman d’un écrivain hongrois racontant l’histoire d’un type arrivé par hasard dans une ville, sans qu’il n’arrive à aucun moment à savoir où se trouve. Mais aussi sur Le poisson scorpion de Nicolas Bouvier, paru dans les années 1980, relatant son expérience d’isolement à Ceylan dans les années 1950 l’ayant presque conduit à la folie. Enfin, W ou le souvenir d’enfance de Georges Pérec, 1975 lui a permis de questionner ce que signifie le fait de ne pas avoir de racines quand vos parents sont morts en camps de concentration, que la maison où vous avez grandi a été démolie, que vous n’avez aucune tombe où vous recueillir, et comment l’enfant de 9 ans qu’était Pérec aurait aimé vivre la vie décrite « dans les livres de classe », celle des gens qui ont des habitudes.
Pour décrypter ces textes littéraires, l’analyse proposée par Bernard Debarbieux dans le N°1 de L’espace géographique, 2014 a été d’un grand recours. L’habiter repose sur des liens qui relient aux autres et au sol. C’est d’ailleurs ces liens, ces routines qui ont permis à ceux qui étaient enfermés dans les camps de concentration de survivre (voir à ce propos l’article de A.F. Hoyaux « Pouvait-on habiter dans un camp de concentration sous le nazisme ? ).
Catherine Didier-Fèvre © Les Clionautes