L’infographie est omniprésente dans notre espace quotidien. La géographie devait fatalement s’y intéresser un jour ou l’autre : c’est désormais un objet d’étude.
Marina Duféal appartient à l’UMR 5319 (laboratoire « Passages »). Elle est l’auteur d’une thèse intitulée Les sites web, marqueurs et vecteurs de dynamiques spatiales et économiques dans l’espace méditerranéen français, soutenue à Avignon sous la direction de Loïc Grasland (2004).
Entre 2008 et 2015, Marina Duféal a participé au projet de recherche RAUDIN (Recherches aquitaines sur les usages pour le développement des dispositifs numériques). On recommandera d’ailleurs la lecture de l’article « L’Atlas de l’Aquitaine numérique ou comment donner forme au déploiement d’Internet dans les territoires du tourisme », publié dans la revue Sud-Ouest européenMarina Duféal, Julien Gelly et Franck Mérillou, « L’Atlas de l’Aquitaine numérique ou comment donner forme au déploiement d’Internet dans les territoires du tourisme », Sud-Ouest européen, n° 29 | 2010, p. 83-93., qui propose des sources très intéressantes.
Introduction. Mais pourquoi les infographies ?
Marina Duféal a d’abord rappelé son goût pour le graphisme, l’art, l’univers fictionnel. Elle participe d’ailleurs au festival Géocinéma, qui «qui utilise le film de fiction comme un point de vue sur le monde contemporain, objet de recherche des géographes»Sur ce festival, lire Véronique André-Lamat, Marina Duféal, Isabelle Sacareau, Mayté Banzo, Marie Mellac, Béatrice Collignon, « Hors les murs, sur les toiles : Quand la Géographie fait son cinéma », Annales de géographie, n° 709-710, 3-4/2016, p. 418-431, éd. Armand Colin. Disponible sur Internet..
Or, la géographie est traversée par des travaux liés à l’esthétisme, à l’art (Volvey, Jégou). Nicolas Lambert ne cesse d’ailleurs de rappeler qu’être scientifique en faisant de la cartographie n’empêchait pas d’être aussi créatif.
Enfin, l’intérêt pour l’infographie rejoint une interrogation pédagogique, dans la mesure où il s’agit d’un support didactique.
Au commencement, le pictogramme
Qu’est-ce qu’un pictogramme ? Il s’agit à la fois d’une représentation graphique mais aussi schématique, qui a une fonction d’écriture. C’est la structure élémentaire d’une infographie.
Son domaine d’utilisation est très large : les axes routiers, les infrastructures de transport (aéroports, etc.), les tableaux de bord des automobiles.
L’infographie a à voir avec la vitesse : elle est le résultat de la recherche d’une économie de moyens, pour faire passer une information très rapidement.
Marina Duféal y voit un point commun avec les chorèmes : l’infographie comporte une grammaire graphique et une dimension poétique.
Qu’est-ce qu’une infographie ?
C’est une représentation visuelle d’informations. Elle combine des pictogrammes, des chiffres, des cartes, des illustrations. Sa fonction est de construire des contenus. Elle est réalisée dans une sorte de décor spécifique, avec un thème, une harmonie.
Son domaine d’utilisation est plus restreint que celui du pictogramme. Elle est utilisée par le journalisme, notamment dans ce qu’on appelle le « datajournalisme» (comme le fait l’équipe des Décodeurs, sur le site du Monde), et dans la communication en général.
Elle repose à la fois sur la vitesse et sur l’esthétisme. L’objectif est de donner à comprendre très rapidement des informations complexes.
Le programme RAUDIN a d’ailleurs été l’occasion d’un travail avec des communicants sur le numérique et l’agriculture viticole, dans le cadre d’une analyse territoriale du web. Des échanges de pratiques ont eu lieu sur les méthodes de la cartographie et de l’infographie.
Dire, lire au prisme de la vitesse
Les temps de lecture sont modifiés avec la généralisation des écrans. Mais c’est aussi le résultat de l’éparpillement des sources d’information que l’on parcourt, en passant de l’une à l’autre (sérendipité).
Ainsi, même l’environnement de la recherche et des enseignements sont marqués par la vitesse. Des doctorants sont invités à présenter leur thèse en 180 secondes, ce qui oblige à travailler l’oral et l’image ; les MOOC obligent à condenser des cours en 5 à 10 minutes, de la même façon que les conférences TED (Technology Entertainement & Design) le sont en 18 minutes.
Or, l’infographie participe de ce mouvement, dans la mesure où on peut la considérer comme une sorte de concrétion de mesures, de chiffres, de regards et de savoirs.
Conclusion. De «nouvelles» formes d’écritures géographiques
L’infographie mérite un plus grand intérêt. Elle permet un décryptage de l’information géographique, de valoriser des travaux de recherche, un appui à la synthétisation de la profusion de données (dans le domaine de l’enseignement). En outre, elle permet d’exprimer sa créativité, en obligeant à lier fond et forme.
Toutefois, son usage oblige à un certain recul critique. Il s’agit de faire attention à l’indication des sources, et à la pertinence du mode de représentation graphique retenu.