L’ouvrage (4ème de couverture) :

 » Les épices, moteur de l’histoire  » ? Après Marx, des historiens contemporains ont cherché à mettre en évidence le rôle fondamental des épices dans l’histoire du monde médiéval et moderne. Leur quête incessante aurait stimulé les voyages vers des terres jusque-là inconnues, provoqué la révolution nautique médiévale transformant les formes et l’usage des navires, suscité la conquête par les Occidentaux des pays producteurs d’Extrême-Orient, bref serait à l’origine de la domination du monde par les nations d’Occident. Sans la recherche effrénée des précieuses épices, Christophe Colomb, Vasco de Gama ou Magellan n’auraient pas laissé leur nom dans l’histoire.
Mais pourquoi un tel attrait ? Censées provenir du Paradis même, les épices constituaient au Moyen Âge un symbole de richesse, de bonheur et de prestige, de confort matériel et de prééminence sociale, des marqueurs sociaux de goût et d’élégance. Leur prix élevé dû à leur rareté et à leurs origines lointaines et mystérieuses les réservait à l’élite de la société médiévale pour ses repas de fête ou pour les soins du corps. Elles n’étaient pas une marchandise comme une autre : à la fois condiment et médicament, teinture et parfum, le mot species (espice en vieux français) s’applique abusivement à la fin de cette époque à l’ensemble des drogues condimentaires, tinctoriales et pharmaceutiques, venues de l’Extrême-Orient, des pays de l’océan Indien ou du Proche-Orient, et qui, par l’intermédiaire des marchands arabes, arrivaient aux mains de l’aristocratie marchande des grandes cités méditerranéennes. Son usage se répartit entre la table, la pharmacopée et l’atelier. Rien d’étonnant dès lors si les textes médiévaux classent parmi les épices des produits comme le riz, le miel, le sucre ou les oranges, la cire ou le coton.

De la Chine ou de l’Indonésie, arrivant en Occident par des itinéraires segmentés au sein desquels Arabes et Mongols jouent un rôle majeur, avant de passer le relais aux Génois, aux Vénitiens ou aux Catalans, installés dans leurs comptoirs d’Alexandrie, de Beyrouth, de Constantinople ou de mer Noire, ces préciseuses épices dessinent une première géopolitique mondiale.

L’auteur :

Michel Balard est un historien français, spécialiste du Moyen Âge.
Agrégé d’histoire (1959), étudiant à l’École pratique des Hautes Études (IVe section), il a ensuite été membre de l’École française de Rome de 1965 à 1968. Il soutient sa thèse de doctorat intitulée La Romanie génoise (XIIe- début du XVe siècle) (1976, Paris-I). Il s’est intéressé surtout à la colonisation en particulier dans l’Orient médiéval du XIe (à partir de la Première croisade) jusqu’au XVe siècle, lors de l’apogée des cités-États de la péninsule italienne.
Ses recherches s’effectuent autour du commerce, des institutions politiques et culturelles de la Méditerranée orientale (Terre sainte, Chypre, Syrie), en Asie centrale (l’empire de Gengis Khan) et en Chine. Il est aujourd’hui professeur émérite de l’université de Paris-I Panthéon-Sorbonne.

Directeur de collection chez Hachette Supérieur, il dirige notamment la collection « HU Histoire » ainsi que de nombreux volumes de la collection « Carré Histoire ».

Il est président de la Société Historique et Archéologique de Sucy-en-Brie (SHAS) et de la Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Paris et de l’Île-de-France qui rassemble une centaine de sociétés de la région.

 

Cet entretien a été mené par Jean-Philippe Martin, également rédacteur du compte-rendu de cet ouvrage (cliquez ici pour le lire).