La conférence réunit François Bost, professeur de géographie économique et industrielle à l’université de Reims Champagne-Ardenne, Gabriel Colletis, professeur de Sciences économiques à l’université de Toulouse-Capitole, et Ophélie Petiot, agrégée de géographie et doctorante.
Face aux défis climatiques, géopolitiques, et énergétiques, la réindustrialisation s’impose comme une nécessité absolue pour répondre aux défis de la décarbonation, de la perte de souveraineté, des déficits abyssaux de la balance commerciale et de la revitalisation des territoires. Si les attentes sont immenses, les freins à la réindustrialisation sont paradoxalement déjà très présents, comme autant d’urgences à résoudre.
Présentation par les intervenants du thème : l’« urgence de la réindustrialisation en France »
Gabriel Colletis :
On a souvent considéré en France que la désindustrialisation était un processus normal voire souhaitable. Les économistes en portent la responsabilité écrasante, car un certain nombre d’entre-eux ont diffusé l’idée selon laquelle un pays qui se développe passe du secteur primaire au secteur secondaire, puis du secteur secondaire au secteur tertiaire. Cette thèse qui n’est pas spécifiquement française, prônant le développement par la désindustrialisation, a eu un certain écho, mais pas en Allemagne. En effet, les Allemands restent convaincus qu’un pays qui laisse filer ses activités productives est un pays qui ne pourra pas demeurer sur une trajectoire de développement.
Depuis quelques années, on assiste à une prise de conscience en France de l’importance de l’industrie, dans l’espoir d’une renaissance industrielle.
François Bost :
Après des années de désindustrialisation mais aussi de « désindustrialisation des esprits », le géographe ressent les signaux faibles d’une pensée affirmant un besoin de réindustrialisation, mais vraiment à contre-courant.
La COVID a été un effet d’accélérateur, avec le manque de masques. Où sont les machines ? Où sont les industriels ? La crise russo-ukrainienne a montré notre niveau de dépendance énergétique.
Donc on voit que cette succession de crise amène à des changements de paradigme.
Ophélie Petiot :
La culture industrielle reste extrêmement présente sur les territoires Grand-Est, notamment dans le sud de la région Champagne-Ardenne, dans le bassin lorrain et en Alsace. Ophélie Petiot a choisi de travailler sur l’industrie agroalimentaire, parce qu’elle concentre la majorité des produits que nous consommons.
L’industrie agroalimentaire est finalement très peu traitée, en règle générale, dans les sciences humaines et sociales, donc cela a été l’occasion d’apporter un regard sur un secteur industriel qui est peu étudié, mais en même temps extrêmement concret parce qu’au cœur de nos assiettes, tout simplement. Ce secteur industriel, qui rassemble plus de 500 000 emplois, s’efforce d’avoir une très grande résilience, face à ses défis. Depuis les années 50, les statistiques de l’INSEE montrent que les effectifs sont très stables.
Défis et enjeux de la réindustrialisation (François Bost)
Le secteur industriel doit réussir des transitions, énergétique, climatique, écologique, qui s’offrent à nous. Certes, on parle de réindustrialisation aujourd’hui, mais il faut pas se tromper de séquençage.
Le séquençage n’est pas la désindustrialisation avant, et maintenant la réindustrialisation
Nous sommes plutôt rentrés dans une phase où concomitamment, on constate la désindustrialisation qui va se poursuivre, et à côté, on observe une phase effectivement de réindustrialisation, par l’avènement de nouveaux secteurs d’activité, des secteurs anciens qui se réinventent. De ce fait, dans un même territoire, on distinguera des entreprises qui vont péricliter ou disparaître, et inversement, des activités qui vont prendre le relais, se redéployer.
Un maître mot : la décarbonation
Le monde industriel depuis le début de la Révolution industrielle, s’est fondé sur l’économie carbonée, du charbon, du pétrole, du gaz. La plupart des acteurs sont convaincus qu’il faut tourner cette page, au risque sinon de voir disparaître ces entreprises. Les réticences sont encore fortes, mais l’Europe est à la pointe en la matière. On rentre dans des changements de paradigme particulièrement importants, d’une ampleur inédite, qui imposent de réussir.
L’état des lieux de la désindustrialisation
La France est un des pays les plus désindustrialisé d’Europe. Ceci s’est effectué dans une grande indifférence de la classe politique, tout bord confondu, qui a pris au mot l’expression de société post-industrielle.
Prétextant qu’on a plus besoin de l’industrie, on transfert l’activité vers les pays à bas salaires. En comparaison l’Allemagne et l’Italie, on a su garder un socle industriel extrêmement solide.
La réindustrialisation s’avère donc compliquée parce que nos tissus industriels sont très détricotés, très fragilisés. Il existe des métiers que l’on ne sait plus faire, obligeant à les réinventer ou à les recréer.
Il faudra au moins une bonne dizaine d’années à condition que le rythme soit soutenu pour que effectivement on puisse voir des effets tangibles de cette réindustrialisation.
Le contexte général a profondément changé
La COVID-19 a fait resurgir la prise de conscience de nos dépendances à l’international. La crise énergétique nous a rappelé que l’Europe reste la région du monde la plus dépendante de l’extérieur.
Le coût de l’énergie d’une manière générale (l’électricité par exemple), pèse sur le redéploiement de nos activités. Donc le contexte international, c’est aussi l’évolution de la géopolitique, où on est de plus en plus dans une fragmentation et une régionalisation du monde, et une montée des tensions.
Avec une guerre économique entre grandes puissances, on peut mesurer combien dans la régionalisation du monde comme l’Union européenne peut apporter des solutions à travers sa zone d’intégration régionale, qui permet de reconsidérer les activités dans un contexte européen.
La question de la souveraineté
Lorsqu’on parle de souveraineté industrielle européenne, ou de souveraineté française, cela revient à penser à nos intérêts face aux Américains, aux Japonais. La question de la souveraineté resurgit alors qu’elle était presque absente des débats jusqu’à maintenant, car le concept était vu comme relevant du registre de l’extrême-droite (confusion avec le concept du « souverainisme »). La redécouverte du lien indissociable entre l’industrie et les notions de puissance (sur le plan géopolitique) et d’indépendance stratégique, doit être considérée.
Le « Made in France » face à la perte considérable des emplois industriels
Il est devenu en quelques années un vrai argument pour relocaliser la production en France, ou pour créer directement sur le territoire national de nouvelles activités.
La France a perdu la moitié des emplois industriels (à son apogée, 6 millions de personnes en 1973). Après 2017, on assiste à une stabilisation et on se remet à créer de l’emploi industriel. Depuis cette date, 180 000 emplois ont été créés.
Récemment la Première ministre en a appelé à des besoins nouveaux dans le secteur de la transition, en tablant sur les dix prochaines années à 60 000 emplois nécessaires.
Le secteur du textile a payé un lourd tribu. Il reste aujourd’hui, à peu près 100 000 personnes. Au plus bas, on dénombrait 35 000 ouvrières. Désormais le secteur redémarre. Contre toute attente, le bassin de Troyes se redéploie. La France est sans doute le pays qui a le plus dénigré son « Made in France ».
Les causes de la désindustrialisation en France (François Bost)
Un effort très insuffisant d’investissement dans la recherche-développement (R & D), encore aujourd’hui
La plupart du temps, le positionnement sectoriel s’établit sur du bas et du moyen gamme, ce qui rend difficile de résister aux pays émergents, En dehors de quelques secteurs phares comme l’aéronautique, l’aérospatiale, ou la pharmacie, on est encore dans le moyen de gamme.
Un investissement trop faible dans la modernisation des parcs machines des usines
On a trop peu modernisé notre parc machine, alors que les choses changent en ce moment. Entre 2012 et 2020, l’âge moyen de nos machines étaient de 17 ans, tandis qu’il était de 9 ans en Allemagne, ce qui signifie dans le cas français moins de productivité, plus de pannes, moins de formation du personnel sur des technologies performantes, un taux d’utilisation des machines en baisse régulière… Les dépenses de modernisation des entreprises françaises sont en moyenne trois à quatre fois moins importantes.
La robotisation était très en retard
La France est un des pays faiblement robotisé, en raison de l’incohérence de la classe politique et de sa méconnaissance avérée des questions industrielles. Pour rattraper le retard, la France va devoir investir de manière significative.
En 2020, la France était classée à la sixième place mondiale en nombre de robots achetés cette année-là (5 400 unités, soit 1,4 % du total mondial), très loin derrière la Chine avec 168 000 unités, soit 44 % du total mondial. Seul le secteur de l’automobile présentait en France un niveau de robotisation comparable à celui des standards européens.
La production domestique est plus faible en France
Cela signifie qu’on fabrique moins que nos voisins. Donc, on importe évidemment des biens que nos voisins, italiens ou allemands, fabriquent chez eux.
Le déficit commercial est fort : aux alentours de 165 milliards
Il est impératif d’exporter pour éviter le déficit budgétaire. Donc il apparaît un besoin impérieux de réindustrialiser pour exporter en vue de rééquilibrer notre balance commerciale. Cela devient une obsession pour les gouvernements qui se succèdent.
Le manque à gagner pour l’industrie française est estimé à 20 milliards d’euros de valeur ajoutée additionnelle et à environ 200 000 emplois.
Le contexte a changé, et devient favorable.
Le contexte de crise a changé aussi les représentations en la matière, en créant à nouveaux des emplois.
La terminologie dans le contexte de la désindustrialisation/réindustrialisation (Gabriel Colletis)
Décarbonation ou défossilisation ?
Les Allemands ne parlent pas de décarbonation, mais de défossilisation, ce qui n’est pas exactement la même chose. Parce que le carbone à deux usages, l’un domestique, et l’autre combustible. Le dioxyde de carbone produit des gaz à effet de serre additionnels, contribuant au réchauffement climatique. Cependant le carbone fait partie du vivant. La décarbonation ne résume pas les enjeux de la transition écologique. Il faut prendre en compte aussi le recul de la biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles…
Lorsqu’on analyse le lien entre l’industrie et la transition écologique, cela passe par la défossilisation, mais il faudrait que les politiques publiques s’attachent aussi à d’autres actions, en promouvant une économie plus circulaire.
Logiques de délocalisation ou logiques d’IDE ?
Il ne faut pas confondre les logiques de délocalisation avec les logiques d’investissement direct à l’étranger. Quand une entreprise délocalise, la définition retenue habituellement tend à montrer qu’on désactive une unité de production dans le pays d’origine, pour transférer l’activité à l’étranger. La production qui est réalisée revient pour servir des marchés d’origine.
Mais la majeure partie des investissements directs à l’étranger ne relève pas des délocalisations, mais de la conquête de marchés étrangers.
L’industrie françaises est plutôt dans une logique de délocalisation, tandis que l’industrie allemande est plutôt dans une logique de conquête de marchés extérieurs. Quand les industriels allemands de l’automobile investissent en Chine, ce ne sont pas des délocalisations. Les véhicules qui sont produits ou assemblés en Chine ne viennent pas servir le marché européen ou allemand, ils correspondent au marché chinois.
L’automobile française était très largement excédentaire en termes de balance commerciale jusqu’en 2005. Aujourd’hui, la balance commerciale française du secteur de l’automobile est ultra déficitaire, en délocalisant.
Qu’est-ce qui a changé depuis 2012, après avoir publié « l’urgence industrielle » ? (Gabriel Colletis)
La prise de conscience des effets catastrophiques de la désindustrialisation, dans les élites dirigeantes, intervient avec la publication du rapport Gallois (2012)
Les conclusions qui ont été tirées ont été réductrices au regard du rapport. Les pouvoirs publics ont retenu du rapport Gallois que les coûts du travail en France étaient trop élevés et qu’il fallait diminuer les cotisations sociales. Ce qui n’était probablement pas du tout la bonne voie parce que la compétition industrielle se joue en petite partie sur les coût du travail, et que majoritairement elle se fait sur l’innovation, la qualité et le caractère durable ou pas des produits qui sont réalisés.
La crise sanitaire a été un véritable choc
Avec une population plus âgée en Allemagne on aurait dû avoir un taux de mortalité plus élevé qu’en France. Pourtant la mortalité est nettement supérieure dans les 18 premiers mois en France. Selon Gabriel Cottelis, cela s’explique tant par les politiques de santé, que par le résultat de la désindustrialisation (matériel de santé, médicaments, vaccins).
Qu’est ce qu’on va faire et qu’est-ce qu’on ne fera plus ?
En lien avec un problème d’acceptabilité sociale, les produits sales devraient disparaître. On ne peut plus dégrader l’environnement des équilibres naturels et martyriser les personnels.
Pendant très longtemps, on a soit séparé, soit opposé l’industrie et l’environnement. Il existe un ministre de l’économie et un ministre de la transition écologique, énergétique.
Même si désormais dans l’organigramme du gouvernement aujourd’hui, la Première ministre est supposée assurer la cohérence de l’ensemble de la planification écologique, on a encore affaire trop souvent à des responsabilités politiques qui restent séparées. Il en est de même au niveau des collectivités territoriales. Ces séparations ne facilitent pas l’élaboration de stratégies publiques.
Selon Gabriel Cottelis, toute la politique économique devrait être traversée par l’objectif de transition écologique.
La transition écologique coûte très chère, imposant des suppléments de réglementation (par des contraintes écologiques), au risque de perdre en compétitivité.
La transition écologique ne se fera pas sans industrie, car en matière d’énergie et de consommation dans notre vie quotidienne, on va avoir besoin de produits industriels d’un autre type.
Si on veut recouvrer notre compétitivité, cela se fera par l’écologie ou cela ne se fera pas.
En prenant l’exemple du secteur de l’électroménager, on ne produit plus en France de machines à laver le linge depuis maintenant 3-4 ans, depuis la fermeture de l’usine Whirlpool à Amiens.
On importe en France, chaque année, entre 2,5 et 3 millions de lave-linge. Ces chiffres sont élevés car la durée de vie est seulement de 4 ans.
La solution pour faire renaître une industrie française ou européenne du lave-linge est de produire un lave-linge écologique, éco-conçu. Cela signifie qu’aucune partie de la machine ne doit représenter plus que 15 % à 20 % de la valeur totale du produit. Ainsi la réparabilité ne dépend pas de la disponibilité des pièces détachées, mais de l’écoconception.
Un certain nombre d’industriels commencent à comprendre qu’il faut éco-concevoir des produits plutôt que de produire des biens qui sont pas réparables, durables, et partageables.
Enfin, la charge de la transition écologique ne repose pas uniquement sur les utilisateurs.
Est-ce que les industriels de l’agroalimentaire ont pris la mesure de ces changements de paradigme, et comment s’en emparent-ils ? (Ophélie Petiot)
L’agroalimentaire revêt des formes extrêmement disparates. En France, 98 % des entreprises agroalimentaires sont soit des micro-entreprises, soit des petites et moyennes entreprises.
L’engagement dans la transition écologique de ces entreprises est variable, tout dépend des moyens financiers des entreprises.
La politique RSE (responsabilité sociétale des entreprises) n’est pas obligatoire pour les petites et moyennes entreprises. Cela s’effectue sur la base du volontariat. Certaines entreprises ont envie d’avancer dans la transition écologique.
La question de l’engagement constitue est un des points importants
Des chefs d’entreprise et quelques membres de l’équipe choisissent depuis même une vingtaine d’années de commencer à mettre des panneaux solaires sur les toits de leur entreprise, de commencer à réduire l’utilisation de ressources.
Le secteur de l’agroalimentaire demeure très particulier parce qu’il est à la convergence des enjeux de l’agriculture. Des procédés de transition écologique sont mis en place, comme la réduction de l’eau utilisée pour la transformation de certains aliments, ou l’apport d’une nouvelle source d’énergie, plutôt électrique. La multitude de stratégies au sein de ces entreprises est difficile à caractériser aujourd’hui.
La question des représentations est essentielle pour engager une transition écologique au sein d’entreprises
Sans humain, sans personnel, les machines ne peuvent pas faire de la transition écologique toutes seules. L’industrie agroalimentaire se retrouve tiraillée sur la question des représentations. De jeunes personnes, fraîchement diplômées, sont prêtes à travailler dans la transition écologique, mais ne souhaitent pas être recrutées par l’industrie agroalimentaire. Ce secteur industriel n’est pas toujours perçu comme de la véritable industrie. En fabriquant un saucisson, on ne fabrique pas la même chose qu’un Airbus.
La question de la formation est aussi fondamentale
Comment réussir à entamer une transition écologique au sein des entreprises agroalimentaires si on n’est pas capable de former du personnel. Le déficit de formation au sein de ces entreprises va freiner également cette transition écologique.
En aval, les consommateurs parce qu’ils achètent, peuvent exercer une pression sur l’industrie agroalimentaire pour créer un changement
Certains secteurs sont en train de souffrir de ces transitions. C’est le cas du secteur de la viande où la consommation baisse. La marque HappyVore est le reflet d’une mouvance. Elle a ouvert une usine de steaks végétaux, proposant ainsi des protéines végétales comme alternative aux protéines animales.
La transition écologique dans ces industries dépend donc à la fois d’une volonté, mais aussi de contraintes.
La question de la grande distribution
Le rapport 2023 de l’Observatoire de la formation des prix et des marges montre que les marges, sur un produit que l’on consomme, sont énormes d’un point de vue agroalimentaire, mais aussi du point de vue de la grande distribution. Quand on achète un produit, on paye à peu près la moitié du produit de base initial à l’agriculture. En 2022, la marge de la grande distribution est de 29 % sur ces produits.
L’industrie agroalimentaire peut s’emparer des transitions, mais parfois elle n’en est pas capable. Les petites et moyennes entreprises ne disposent pas toujours de la trésorerie nécessaire et n’ont pas les moyens d’investir dans la décarbonation.
Pour pouvoir faire cette transition écologique, il faut d’abord innover
Certaines grandes entreprises vont même racheter des entreprises, des start-up, des entreprises de la Smart food, qui vont moderniser notre façon de consommer.
Danone ou Lactalis rachètent ces entreprises de la Smart food pour avoir directement l’innovation en leur sein.
Le secteur de l’agroalimentaire est tiraillé entre une nécessité de transformation, de changement qui est attendue de la part des consommateurs, avec l’envie de bien manger, de bien savoir ce que l’on consomme.
Il est possible que les plus grands groupes résistent beaucoup plus facilement aux politiques qui sont mises en place aujourd’hui.
Les principaux freins à la réindustrialisation (François Bost)
La disponibilité de la main-d’œuvre et le problème des compétences
Les industriels qui perdent des marchés ne trouvent pas de personnes à embaucher. Près de 75 000 emplois industriels, pourtant mieux payés que dans le secteur des services, ne trouvent pas preneur. On recherche des soudeurs EDF, que l’on fait venir du Canada et des États-Unis pour réparer des centrales nucléaires.
Les besoins sont donc énormes pour l’industrie. On observe un niveau de formation qui est moyen, un désamour vis-à-vis des métiers de l’industrie, une réactivité aussi trop faible, trop lente de la part des établissements de formation, ce qui fait que beaucoup d’industriels préfèrent former en interne pour éviter une perte des marchés, à l’image de Hermès ou de LVMH qui court-circuite les CFA.
La question liée au foncier : Aura-t-on assez de surface à proposer aux industriels ?
En août 2021, la loi « Climat et résilience » a été votée. Elle prévoit la Zéro Artificialisation Nette (ZAN). C’est un changement de paradigme total. D’ici à 2050, un industriel ne pourra plus s’implanter en périphérie des villes. La ville doit se réinventer sur la ville. La loi impose la réduction par deux de l’artificialisation des terres d’ici 2030.
La France est un pays qui a longtemps artificialisé : tous les 7 ans, on a la superficie d’un département français de taille moyenne (comme les Yvelines), soit 2 700 km² complètement artificialisés. A l’avenir, il y aura de moins en moins de sols disponibles.
Mais dans les dix prochaines années on aurait pas avoir trop de problèmes pour trouver des implantations, en sachant que les nouvelles usines sont plutôt très petites. Actuellement, on crée plus d’usines qui n’en ferment. Elles embauchent entre 30 et 45 personnes. Par comparaison, une giga Factory qui ouvre, c’est entre 1500 et 2 000 personnes.
La menace de pas avoir assez de foncier est toutefois bien réelle.
Les ressources en eau
ST-Microélectronics à Grenoble, accapare 20 % de la consommation en eau de la région. Pourtant, l’entreprise prévoit le doublement de sa superficie, financé en partie par l’État. Il s’agit ici de la question de l’acceptation de l’acceptabilité. On avait oublié le rôle de l’industrie comme facteur de pression sur les milieux.
La cohabitation des activités, les unes avec les autres, restent compliquée.
Un problème de ressources, qui conduit à la dépendance
On ne produit plus en France de matières premières. Le code minier est complètement vétuste.
On fait venir les matériaux critiques de l’étranger, comme le lithium, pour produire des batteries.
La question de la souveraineté est importante.
La dimension culturelle
Il manque un imaginaire industriel. On n’a jamais eu autant besoin de l’industrie pour réussir cette transition. Les jeunes ne veulent plus aller dans des lycées professionnels. Le salon de l’agriculture attire les familles, pas celui de l’industrie.