Armée Vs Éducation nationale – Aujourd’hui, l’armée a plus à offrir aux professeurs. Quelles leçons en tirer ? Une remise à plat nécessaire

Il y a quelques jours, étaient publiées sur parlonsdecole.fr plusieurs annonces de postes, ouverts au recrutement, en établissements militaires. Il s’agissait plus précisément de postes à pourvoir au sein de l’école militaire de Saint-Cyr et du lycée naval de Brest. Cette publication ne se voulait qu’un simple relais d’informations sans prétention. Il s’agissait, mais pas seulement, de postes en histoire-géographie. Et c’est à ce titre que cette question nous interpelle.

Or, ces annonces ont suscité un véritable engouement tant sur les groupes facebook, comme celui des Clionautes, que sur le site parlonsdecole.fr.

Loin des clichés véhiculés par quelques enseignants et syndicats sur le monde militaire, il apparaît clairement que de nombreux collègues sont attirés par les conditions qu’offrent ces postes.

L’institution militaire semble plus à même de répondre aux attentes des enseignants en termes de conditions de travail, d’exigences et de comportement. Le premier facteur clé est celui de la discipline. Pour l’enseignant qui exerce dans ces classes, nul besoin de passer son temps à gérer l’indiscipline et les incivilités. L’armée fonctionne sur un principe contractuel, dont une des bases est le respect de l’autorité. Ce principe est non négociable et toute la structure hiérarchique se tient à cette règle.

Enseigner d’abord !

Annonces arméeL’enseignant n’a donc à se consacrer qu’à son cœur de métier : sa discipline académique et la mise en œuvre de celle-ci via la pédagogie de son choix. La pédagogie n’est pas convoquée pour conserver un semblant de calme dans les classes, mais pour faire progresser les élèves.

La deuxième raison tient au prestige de ces institutions militaires qui n’ont jamais bradé leurs formations. Ces institutions partent du principe que l’exigence et l’excellence sont les meilleurs gages de respect de l’égalité des chances.

militaires enseignerCes formations reposent sur un choix éthique qui conduit à ne laisser personne de côté ; celui qui est en difficulté trouvera sa place et sera intégré dans une autre formation mais il restera militaire et il pourra s’épanouir dans une carrière professionnelle complète. Combien d’entre nous rêvent de pouvoir mettre en place une telle philosophie au sein de l’éducation nationale non pas en abaissant le niveau mais en permettant à chacun de s’élever réellement ?

La troisième raison est liée à la logique de la formation qui repose sur une approche académique et sur le retour d’expérience permanent encadré par des supérieurs expérimentés et légitimés par leur engagement. Nous sommes bien loin de l’idéal de l’éducation nationale dans laquelle la formation des futurs professeurs est confiée à des théoriciens, quand il ne s’agit pas de gourous, ou, pire encore à des enseignants en échec qui n’ont que rarement eu à faire face à des élèves.

Le choix de l’exigence

La quatrième raison, celle qui conduit les Clionautes à développer cette réflexion réside dans la place que l’on accorde à nos disciplines dans l’institution militaire. Celle-ci ne se contente pas, contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, de développer l’histoire-bataille ni de références à ce que l’on appelle « les traditions » qui reposent évidemment sur un substrat historique.

Quand De Gaulle disait : « l’école du commandement, c’est la culture générale », il pensait probablement à l’histoire. À cet égard la place de l’histoire comme de la géographie est essentielle dans les parcours de formation des armées, à tous les niveaux. Du brevet de technicien supérieur de l’armée de terre à l’école de guerre, la géographie comme l’histoire interviennent en permanence. Et pour la géographie cela se traduit de façon extrêmement pratique, à la fois dans les présentations de « situation pays » qui précèdent une opération extérieure, mais également sur le terrain.

L’histoire est également convoquée par l’intermédiaire des concours internes, véritables outils d’ascension sociale au sein de l’institution qui valorisent l’investissement. Rien à voir avec les cooptations de fait dans les fonctions d’encadrement ou de pilotage que l’on trouve à certains niveaux de l’éducation nationale.

La grande différence entre une formation militaire et l’INSPE c’est qu’au sortir d’une école militaire, la personne est prête à exercer alors qu’au sortir de l’INSPE, il lui reste encore beaucoup à apprendre.

La cinquième raison tient à l’image de l’institution militaire. L’armée est aujourd’hui une des institutions qui disposent d’une des meilleures images auprès de l’opinion publique, contrairement à l’éducation nationale.

Certes, on peut toujours convoquer le fameux “prof bashing” de certains médias ou de certains politiques mais il faut également oser se regarder en face : nous ne sommes pas toujours à la hauteur de nos missions. Quelle image donnent certains professeurs d’histoire et de géographie quand ils se contentent de la dilution des fiches Eduscol et de références formatées de l’évaluation par compétences en guise de cours. Présentés de façon « ludique » évidemment !

Il ne s’agit pas que d’une question de moyens mais également d’une question d’attitude. L’armée qui était une des institutions les plus décriées dans les années 70 a su faire son aggiornamento ; elle a su se remettre en question, redéfinir ses missions, redéfinir sa philosophie et se recentrer sur son cœur de métier. Il serait grand temps que nous, professeurs d’histoire et de géographie, soyons capables d’en faire autant.