L’écriture est nécessaire au chercheur lui-même, à ses collègues, au grand public que l’archéologie passionne. Les écritures de l’archéologie se déploient donc à partir de la trouvaille, formant comme autant de scènes où le passé retrouvé est donné à voir et à lire : le journal de repérage, le journal des fouilles, la chronique du chantier, le relevé des opérations techniques et des découvertes qu’est en train de transformer l’introduction de la saisie numérique immédiate, le rapport, l’article, le livre, le documentaire, l’exposition, etc.
Ces expressions du savoir sont presque toujours en archéologie démultipliées. D’une part, l’arsenal législatif qui encadre la pratique de l’archéologie génère une production de type réglementaire qui a ses propres codes. D’autre part, parce que l’archéologue est toujours amené à décliner un même contenu sous des formes différentes pour des publics différents. L’exigence de monstration des résultats conduit ainsi les archéologues à élaborer des expositions, des salles permanentes de musée et aussi, de plus en plus, des présentations in situ qui intègrent le savoir archéologique et le récit historique qu’il fonde, dans l’espace habité. Ces mises en scène publiques sont accompagnées par une écriture et une imagerie qui, selon des modalités diverses, traduisent pour un public large le travail des archéologues et nourrissent la rubrique des « actualités de l’archéologie ».
Cependant l’écriture des archéologues ne s’arrête pas à cette panoplie complexe de mises en forme, elle concerne aussi les vies savantes. Avec les historiens, les archéologues sont des auteurs de « mémoires » qui sont centrées autour de deux thématiques, essentielles dans la construction de leur identité. Il s’agit d’abord d’expliciter la part de la vocation et de l’héritage dans la biographie de l’auteur, puisque la légitimité académique de l’archéologie est souvent donnée comme incertaine et menacée. Il convient ensuite de produire le récit plus ou moins héroïque et aventureux de la trouvaille, alors la vie d’archéologue vient nourrir un filon central de l’imaginaire archéologique.
Enfin, de Fred Vargas à Jean Guilaine, les archéologues se font parfois auteurs de fictions et s’il est certain qu’il s’agit là d’un phénomène de mode, largement entretenu par les éditeurs qui incitent les plus grands archéologues à se livrer à l’exercice, il n’en reste pas moins que l’archéologie entretient avec sa propre fictionnalisation un rapport complexe. Qu’il s’agisse du roman, de reconstitution en 3D, de fac-similé de toutes sortes, ces mises en forme permettent de passer de la discontinuité archéologique à la continuité historique, d’une écriture du vide et de la ruine à l’écriture d’une complétude restituée.
Comment se sont fixées, comment ont évolué chacune de ces modalités d’écriture ? Quels liens entretiennent-elles avec la définition disciplinaire de l’archéologie et sa réception publique ? Comment chaque archéologue donne-t-il sens à sa propre polygraphie ? Telles sont, parmi d’autres restant à formuler, les questions qui seront abordées dans le cadre de cette 3ème Université du Patrimoine de Carcassonne.
Jeudi 5 septembre
14 h00
Ouverture
- Marie-Elise Gardel (Amicale laïque, Carcassonne)
- Marie-Claude Marandet (Université de Perpignan Via Domitia)
- Monique Joseph (Service Patrimoine, Ville de Carcassonne)
- Claudie Voisenat (LAHIC et Ministère de la culture)
- Françoise Paraire (ADREUC)
- Introduction
- Noël Coye (conservateur du patrimoine, MCC, Direction générale des patrimoines, Paris, UMR 5608 – TRACES, Université de Toulouse)
Ecritures professionnelles : polyphonie et polygraphie
Modérateur : Michel Martzluff (maître de conférences, Université de Perpignan Via Domitia, Médi-Terra)
- Du chantier des fouilles à la publication : l’horizon collectif des écritures de l’archéologie
- Yann Potin (chargé d’études documentaires, Département Education, culture et affaires sociales, Archives nationales)
Les écritures de l’archéologie : du carnet de fouille à la restitution grand public
Geneviève Pinçon (Sous-direction de l’archéologie, Ministère de la culture et de la communication, ARSCAN) et Oscar Fuentes (directeur du Centre d’interprétation d’Angles-sur-l’Anglin)
Restituer le geste : une écriture en images
Jean-Michel Geneste (conservateur général du patrimoine, Directeur du Centre National de Préhistoire, Périgueux – directeur de l’équipe scientifique de la grotte Chauvet – directeur scientifique des recherches archéologiques de la grotte de Lascaux – membre du PACEA) et Pascal Magontier (auteur réalisateur de la collection « Gestes de la préhistoire », concepteur de dispositifs multimédias de découverte patrimoniale, responsable des archives audiovisuelles de la grotte de Cussac)
Vendredi 6 septembre
9 h 00
Ecritures de soi : autobiographies et biographies d’archéologues
- Modérateur : Jean Vaquer (directeur de recherches CNRS, TRACES – Equipe SMP3C – Toulouse)
- En tête à tête avec l’abbé Breuil. La vie et l’œuvre d’un préhistorien vues par un historien
- Arnaud Hurel (ingénieur de recherches au département de préhistoire du MNHN, Paris)
- Correspondre, publier et hériter : la diffusion du programme analytique de Georges Laplace
- Sébastien Plutniak, (doctorant EHESS, LISST – Equipe CERS, Toulouse)
- Les ego-histoires d’archéologues au prisme de la lexicométrie
- Natacha Sauillac (M2 Soporec, IEP Toulouse)
- L’archéologie convergence du réel et de l’imaginaire : l’approche du chercheur et celle de l’artiste
- Michel Grenet, archéologue, illustrateur et sculpteur, chercheur associé TRACES-Equipe PRBM, Toulouse)
14 h 00
Fictionnalisation
Modérateur : Dominique Sacchi (directeur de recherche honoraire CNRS, TRACES – Equipe SMP3C – Toulouse)
- Fondements épistémologiques de la démarche archéologique : ses rapports à l’enquête de police judiciaire
- Philippe Boissinot (maître de conférences, EHESS, TRACES – Equipe CAHPA, Toulouse)
- L’intrigue archéologique entre énigme et mystère
- Claudie Voisenat (chargée de mission pour la recherche, MCC, mise à disposition du CNRS, IIAC – Equipe LAHIC, Paris)
- De l’exposition au roman : Préhistoire[s], l’Enquête et son concours de nouvelles
- Sylvie Sagnes (chargée de recherches CNRS, IIAC – Equipe LAHIC, Paris)
21 h 00 Si la préhistoire nous était contée…
Entretien avec Pierre Gouletquer, archéologue et conteur, animé par Sébastien Plutniak, (doctorant EHESS, LISST – Equipe CERS, Toulouse)
Contes préhistoriques de Pierre Gouletquer
ENTREE LIBRE
Possibilité de restauration sur place, vendredi midi, pour les auditeurs : Inscription et règlement avant le 1er septembre
auprès de l’Amicale laïque de Carcassonne : 87 rue de Verdun, 11000 Carcassonne,
04 68 25 24 74 alcarcassonne@free.fr