JO de Paris 2024, une réussite inattendue…

La France vient de vivre une quinzaine de communion avec les JO de Paris, un moment rare dans l’histoire souvent tumultueuse de notre pays, comparable aux coupes du monde de football quand l’équipe nationale se hissait en finale de la compétition La cérémonie d’ouverture a rassemblé plus de 24 millions de téléspectateurs, soit une audience encore supérieure au record historique établi lors de la finale de la coupe du monde de football en 2022..

Quelques mois auparavant, les nuages s’amoncelaient pourtant autour de l’événement planétaire avec les risques d’attentats terroristes, de cyberattaques venues de Russie ou de sabotages via des groupes radicaux hostiles aux Jeux. 

Il faut dire que les critiques sur l’organisation avaient plu : le prix des places, jugé exorbitant, l’envolée des coûts des logements disponibles aux visiteurs, les étudiants priés d’aller passer des vacances ailleurs pour libérer leurs logements, les Parisiens empêchés de vivre leur quotidien, sans compter le budget global dont on sait depuis Montréal en 1976 La ville de Montréal avait dû contracter une dette remboursable en 30 ans, ce qui avait dissuadé certaines villes-candidates à tenter d’obtenir les Jeux… qu’il est presque toujours dépassé et surtout rarement amorti. Bref, 12% des Français se disaient « enthousiastes » à l’idée de voir Paris organiser les Jeux…

… à laquelle les enseignants de notre association ont pu s’identifier  

D’abord comme nombre de nos compatriotes, nous avons vibré aux exploits des athlètes français et étrangers venus de 206 « États » Alors que l’ONU reconnaît aujourd’hui l’existence de 193 États, le CIO et les fédérations sportives accueillent 206 « comités nationaux olympiques ». C’est le cas de la Palestine et du Kosovo, de Hong Kong et de Taïwan, et de certaines îles de la Caraïbe et du Pacifique non indépendantes de fait. En revanche, les nations britanniques s’y présentent unies sous la bannière de l’Union Jack., dont une « équipe olympique de réfugiés ». 

Et puis beaucoup d’entre-nous ont été subjugués par ces « Jeux dans la ville », dans la Ville-Lumière qui retrouvait des vertus de salubrité et d’accueil dont on ne croyait plus capable ce « peuple de ronchons », tout en offrant l’écrin extraordinaire de ces richesses architecturales aux athlètes, aux spectateurs et aux téléspectateurs du monde entier. 

Cet engouement n’empêche ni les critiques, ni la lucidité 

Nous n’ignorions pas que cette trêve, survenue après une séquence politique extraordinairement agitée, allait se refermer, certainement après les Jeux Paralympiques et que notre quotidien d’enseignants, bien malmené ces dernières décennies redeviendrait le principal sujet de préoccupation de notre association. 

Une cérémonie d’ouverture qui nous aura interpellé

En tant que praticiens de l’histoire et au fait des tendances historiographiques qui traversent notre discipline L’historien Pierre Singaravélou soulignait récemment aux Rencontres de Plutarque que « nous avons la chance en France d’avoir les enseignants du secondaire les mieux connectés avec la recherche et les travaux académiques prenant en compte l’histoire globale. », nous avons bien sûr été interpellés par la cérémonie d’ouverture qui rappelons-le a été suivie à la télévision par ⅓ des Français, soit l’audience la plus importante jamais enregistrée.

Le chorégraphe et metteur en scène Thomas Jolly a fait l’objet d’éloges et de critiques sévères pour ses tableaux revisitant l’histoire d’un peuple ouvert aux influences extérieures et travaillé par la modernité culturelle. Or nous savons que la trame historique du spectacle doit beaucoup à Patrick Boucheron, coordinateur de l’Histoire Mondiale de la France et figure médiatique connue d’une histoire française déconstruite par l’histoire globale et par celle des colonisations. Cela fait longtemps que nous n’enseignons plus  le « roman national » jalonné de « grands événements » à connaître absolument mais que notre histoire s’est ouverte aux influences et aux regards autres.

Les Jeux ne sont jamais exempts de questions géopolitiques

En tant que praticiens de géopolitique au lycée, nous avons  vu combien les tensions dans les relations internationales actuelles s’étaient invitées aux JO de Paris, bien que Thomas Bach, président du CIO, les ait présentés comme « la meilleure preuve de l’amour de la paix entre les peuples ». Les athlètes de Russie et de Biélorussie n’ont pas été officiellement invités et celles et ceux qui acceptèrent de concourir sans leur drapeau national ne furent qu’une poignée. On ne peut s’empêcher de penser aux boycotts des Jeux de Moscou et de Los Angeles. De même, le fait que les athlètes israéliens aient dû être étroitement protégés renvoie à la terrible guerre actuelle entre Israël et le Hamas, tout autant qu’aux attentats terroristes des Jeux de Munich https://www.herodote.net/5_septembre_1972-evenement-19720905.php. 

Les JO de Paris, c’est culture à tous les étages

Depuis la création des JO modernes, « Le sport, la culture et l’éducation » sont définis comme les piliers essentiels de l’Olympisme dans la Charte olympique. 

Or il apparait clairement que la culture sous toutes ses formes a été convoquée par Thomas Jolly et Patrick Boucheron. La France, naguère soucieuse de son « exception culturelle » face à l’industrie du divertissement anglo-saxon, n’hésite plus à mélanger les genres et à les associer à l’extraordinaire patrimoine architectural de Paris. La présence de LVMH, N°1 mondial du luxe devenu par son sponsoring l’un des ambassadeurs de la culture française en témoigne. Un certain nombre des collègues du CE des Clionautes avaient d’ailleurs tout de suite réagi à la référence Assassin’s Creed Unity, l’opus 4 de la franchise se passant sur les toits du Paris révolutionnaire, recréés avec l’historien Laurent Turcot.

De quoi nourrir d’encore un peu plus de pop culture nos cours de spécialité HGGSP ! 

 

Nous avions invité en juin plusieurs des directeurs de l’ouvrage « Une histoire mondiale de l’Olympisme – 1896-2024 ». La conférence et son compte-rendu sont ici :

Une histoire mondiale de l’olympisme : 1896-2024