Cette table ronde était co-organisée par Futuribles. Il est toujours intéressant de se pencher sur les partenaires du FGG, et les Clionautes sont très bien placés pour le savoir. Crée dans les années 60, Futuribles est un cercle de réflexion économique et libéral qui « cherche à repérer, analyser et comprendre les grandes transformations en cours, à cerner les principales incertitudes, à concevoir des processus de décision et d’action intégrant la prise en compte du long terme et l’implication des acteurs dans la construction du futur ». L’énarque Yannick Blanc, qui a servi dans le ministère de l’intérieur et dans le corps préfectoral, en est le président. Anticiper, transformer le futur, des objectifs qu’on retrouvait dans ce débat, mais avec une inquiétude sourde en fond, celle de la défiance de plus en plus forte envers la science et les nouvelles technologies. Une défiance, analysée par Eddy Fougier, du club Déméter (1), qui profite des fausses informations, des « docteurs Facebook », d’un manque de culture scientifique global et, aussi, d’un manque de communication de la part du monde scientifique vers les citoyens les plus démunis en termes de compréhension des phénomènes complexes. Un fossé qui se creuse avec les mouvements anti-vax, même si ceux-ci se sont atténués par rapport au début de la pandémie actuelle, ou les mouvements anti nucléaires civil toujours actifs, avec environ 30% de la population sceptique d’après un sondage récent paru dans Le Point.
L’enjeu actuel des chercheurs étant aujourd’hui double, comme le montre ensuite Philippe Azaïs, responsable programme au CEA, le Commissariat à l’Énergie Atomique et aux énergies alternatives.
D’abord être en mesure d’expliquer de façon claire au grand public ce que font les chercheurs et les débarrasser de cette image de professeur Nimbus qui leur colle souvent à la peau, et ensuite de gérer la pression du « tout et tout de suite », qui multiplie des injonctions sur la recherche pour qu’elle soit appliquée le plus rapidement possible dans des objets visibles pour les citoyens, avec un risque important de « gadgétisation ». Pierre Papon, un ancien de l’IFREMER et collaborateur de Futuribles, concluait pertinemment la séance en insistant sur l’exigence d’une presse scientifique de qualité, sur une surveillance des réseaux sociaux de sciences alternatives, mais aussi sur la nécessité d’avoir une éducation scientifique de qualité, non seulement envers le grand public dès le plus jeune âge scolaire, mais aussi envers un personnel politique majoritairement incompétent dans les domaines scientifiques et technologiques et trop marqué par la littérature, l’Histoire et les sciences humaines.
Malheureusement, les programmes actuels qui vont vers la réduction du poids des sciences et l’abandon des prétention mathématiques pour une grande partie de la population risque de faire émerger une génération de personnes encore plus rétives à la science et aux nouvelles technologies.
Au final un débat très intéressant, mais quelque peu angoissant quand aux perspectives futures.
Mathieu Souyris, lycée Paul Sabatier, Carcassonne.
(1) Cercle de recherches sur l’agriculture du futur. Une vraie référence.