Cette table ronde dresse les grandes inflexions de la réforme du lycée et ses enjeux.
L’évaluation (Marion Beillard)
Pour les spécialités, on a conservé un format d’épreuves qui ressemblent aux précédentes, dans un souci de continuité afin qu’on puisse préparer efficacement les élèves dans un contexte d’immédiateté. Les spécialités sont présentes pour préparer les élèves dans le supérieur tout en restant dans le scolaire, un continuum… Dans les fiches éduscol, on insiste sur l’apprentissage des capacités.
Les enseignants vont trop loin dans les connaissances. D’après l’inspectrice, sur une dissertation de deux heures, il n’est pas nécessaire de donner trop d’informations car les élèves ont trop à dire (jusqu’où devons-nous aller pour qu’il soit possible de travailler le grand oral ?). Il faut travailler le grand oral dès septembre de la classe de première (parler 5 mn debout sans note et répondre à des questions déjà travaillées ne constituent pas non plus l’entrée à l’ENA !)
Le grand oral (Catherine Biaggi)
Voici les questions à se poser en équipe : le travail des deux questions que les élèves vont préparer et vont soumettre au jury, dans l’ancrage disciplinaire sans partir dans tous les sens. Il s’agit d’un questionnement sur l’ensemble du programme (en lien avec ce que présente l’élève) et sur le projet d’orientation. On attend une capacité à réfléchir, en relation avec Parcours Sup.
L’éducation à l’orientation signifie faire réfléchir sur l’avenir, développer des centres d’intérêt, connaître les possibilités offertes. Les capacités en spécialité, comme analyser, interroger, adopter une démarche réflexive, préparent aux études supérieures.
Mise au point sur le croquis avec un texte :
Ce travail met en œuvre les capacités suivantes : pratiquer un autre langage, mener une synthèse, ordonner, hiérarchiser, démontrer, faire des choix (le croquis est problématisé), sont à mettre en continuité avec le collège.
L’exercice est une forme nouvelle, qui promeut l’apprentissage en classe et où les élèves doivent réaliser un croquis à partir d’un texte. C’est une solution médiane entre les croquis avec juste une question préalable et les croquis bachotés appris par cœur. L’enseignant donne un texte que l’élève transforme en croquis, en relation avec un cours. Les élèves de seconde ont des acquis qui seront exploités avec un guidage de moins en moins fort jusqu’à la terminale.
La Banque nationale de sujets
La BNS (la banque nationale des sujets) rassemble des questions problématisées, des études de documents, des croquis, donc un gros travail de production, largement pourvu par rapport aux autres matières. Certains sujets seront retirés car ils vont vieillir ou qu’ils sont mal sentis par les professeurs. En novembre, vont sortir les sujets pour la BNS de la terminale. Une exigence de qualité demeure. Attention, nous sommes aujourd’hui dans un nouveau lycée très différent qui assure un continuum avec le collège. Le tronc commun est évalué par des épreuves qui restent nationales à travers la BNS mais dont le choix est de la responsabilité des équipes. Par contre, les copies échappent aux professeurs qui ne corrigent pas leurs élèves.
La correction
Il est nécessaire de faire une échelle descriptive de notation, d’attendus et de hiérarchiser entre la première et la dernière évaluation commune. Autrefois, il existait une échelle entre 08 et 12, les excellent 16 et Dieu 20 ! Tout nécessite des ajustements qui demandent du temps et la mise en place d’une culture commune d’évaluation. Donc la réforme constitue le triptyque : progression et pratique, choix de sujet, manière d’évaluer (des objets de travail et des points d’ancrage).
Le programme de géographie pour le tronc commun des séries technologiques
Ils sont calqués sur l’ancienne structure avec des sujets d’études choisis (retour favorable des professeurs) sachant que la BNS est une contrainte. Des problèmes de compréhension se posent en histoire, une ambition intellectuelle difficile à faire passer, mais ils sont communs à toutes les séries avec un tableau des capacités et un tableau des notions. Ils ne sont pas genrés !! Ce sont des programmes à part entière et non des sous-programmes. Les sujets d’études sont originaux, pensés avec l’idée de conserver les éléments qui fonctionnent bien.
Thème conclusif des programmes de la voie générale
Cela signifie que ce thème est à traiter à la fin comme un point d’orgue des trois années du lycée. Les autres thèmes peuvent s’inverser mais pas celui-là. En terminale, la France, objet d’étude obligatoire, est le sujet avec une réflexion géographique centrale d’aménagement. Située après l’évaluation commune, le risque est de ne pas traiter cette question du programme, et de ne pas se soustraire à cette obligation de former le citoyen pour agir, la dimension action est essentielle.
Expliciter la différence entre « sujet d’étude », exemple et étude de cas
Située en amont, contextualisée, une étude de cas est recommandée, possible, et problématisée en relation avec les questions générales. Les leçons de géographie s’appuient sur des exemples au fil de la démonstration, qui ne durent pas une heure. Ainsi, l’étude de cas précède tandis que l’exemple est intégré au fur et à mesure de la leçon, toujours contextualisé et localisé (quoi, où…). Un sujet d’étude peut être fait en amont, filé, ou en synthèse pour remobiliser les connaissances. Il convient de mettre en œuvre un transfert des notions, au territoire, à l’exemple que l’on développe.
Un professeur peut pendant vingt minutes prendre la parole pour faire une démonstration à partir d’un exemple et faire un aller-retour notion-exemple. D’autres modalités didactiques peuvent s’engager pour la mise en œuvre de cet exemple. On est au cœur de la professionnalité des enseignants. La réforme des concours (CAPES) fait évoluer les épreuves, et donc la manière d’enseigner : parole (et sa place) du professeur, travail de l’élève, et leur organisation, dans les modalités proposées : étude de cas, démarche inductive ou déductive, en travaillant les modalités de la transmission.
Les Capacités en HGGSP (Histoire Géographie Géopolitique et Sciences politiques)
Préparer au supérieur : donner des outils intellectuels pour réussir dans le supérieur.
Exemple : travailler en autonomie, permettre aux élèves d’accéder à l’autonomie intellectuelle. Ceci se construit en classe : aller chercher la bonne source, réfléchir.
Se documenter, ce n’est pas uniquement faire des recherches. C’est surtout évaluer la fiabilité d’un document par rapport à son sujet d’étude, apprendre à lire un article, choisir un ouvrage scientifique, puiser les réponses dans un texte. Consacrer en classe du temps pour apprendre à saisir les idées générales d’un texte serait très utile.
Laurent Carroué :
On a une réforme extrêmement importante. L’objectif est de sauver les maths. Aujourd’hui, on a un système de lycée où 80 % des élèves étaient dans la filière S. Il convient de réduire cette part à 25 % pour que l’école forme des ingénieurs compétents au XXIe siècle dans les 20 ans qui viennent. Les programmes scientifiques sont extrêmement exigeants à tel point que certains professeurs de mathématiques ont du mal à les mettre en œuvre, d’où la nécessité d’un redéploiement. Des champs disciplinaires émergent comme éléments de professionnalisation, d’où l’association de l’Histoire-Géographie et des Sciences politiques et géopolitiques. On peut regretter ce processus et les rapports de force qui en découlent, que la science politique ait imposé leur démarche et leur concept.
Les cartes sont absentes. Tout change : les programmes, l’évaluation, les modes de transmission. Des ajustements seront nécessaires. On est sur un quinquennat avec un rythme politique et des choix qui ont été faits. Un échelonnement de la réforme du lycée aurait été possible. Mais ces choix n’ont pas été retenus. Il faut prendre du recul face aux difficultés rencontrées. Le travail d’équipe sur l’organisation dans les établissements paraît une nécessité absolue.
Les exigences de contenus des programmes de lycée semblent énormes.
Les universités demandent surtout des capacités (autonomie, organisation du travail, gestion, capacité de projection, d’auto-progression, en plus de connaissances solides). Ainsi les éléments de capacité et de compétence doivent être autant travaillés que l’acquisition simple de connaissances.
Catherine Biaggi insiste sur une vision « méta » : les disciplines sont au service du parcours de l’élève. La réforme interroge la place des disciplines en lien avec le projet d’établissement et leur cohérence dans le parcours de l’élève.
Inscrire cette réforme dans la durée. Il n’y a rien de plus sélectif que ce grand oral, qui doit déboucher sur un vrai projet.
Christine Valdois et Eric Joly pour les Clion@utes.
Vous pouvez consulter les autres comptes-rendus des Clionautes au FIG 2020.
Vous pouvez également consulter Clio-Lycée pour les propositions de séquences adaptées au Lycée Blanquer.