A l’initiative de la commission « Epistémologie, histoire et enseignement de la géographie » du CNFG (Christine Vergnolle Mainar et Magali Hardouin) et de l’équipe éditoriale de Didagéo (Caroline Leininger-Frézal et Sylvain Genevois), une journée d’étude intitulée « Quelle conception du mémoire de master pour former à l’enseignement de la géographie et de l’histoire dans le premier et le second degré ? » était organisée ce samedi 17 mai à l’Institut de Géographie de Paris.
Dans un premier temps d’introduction, Jean-Pierre Chevalier a présenté une sorte de « mémoire du mémoire » montrant que, si les anciennes générations avaient à charge de produire un travail de fin d’études de type monographique et sans réel questionnement pédagogique, les choses ont changé à partir de 1991 lorsque le mémoire a acquis une dimension formative. Redéfini à partir de 2009, le mémoire à vocation professionnelle présente désormais l’avantage de s’étaler sur 2 ans mais l’inconvénient de devoir se réaliser dans un contexte où l’alternance est réduite.
La période à venir, 2014-2015, pose question dans la mesure où la continuité entre M1 et M2 n’est pas assurée et où certains candidats pourront se trouver exemptés du mémoire (agrégés stagiaires, lauréats des concours déjà titulaires d’un master, sportifs de haut niveau, parents de 3 enfants…).
Dans le second temps introductif, Jean-François Thémines (à l’appui d’un travail mené avec Marc Bailleul) a saisi l’occasion de présenter des éléments de représentation de la recherche chez les étudiants en comparant la situation avant et après la réforme de 2008-2009. A l’aide d’items dont certains concernaient explicitement la recherche (se tenir informé de l’actualité scientifique et des résultats de la recherche), les enquêtés devaient s’exprimer sur le fait de savoir si ceux-ci étaient plus ou moins importants pour eux. Traités statistiquement, les résultats ont assez nettement fait apparaître, avant la réforme, deux groupes d’étudiants bien distincts entre ceux qui pensent que ces items peuvent servir la vie de classe (notamment sur la création d’un climat de confiance avec les élèves) et ceux n’en étant pas convaincus. Les étudiants sondés après la réforme, n’ont quant à eux pas réussi à identifier des cheminements clés dans les différents items leur permettant d’arriver à ces idéaux de réalisation de soi et de positionnement clair dans le métier. Il en ressort que la dilution des pratiques et des discours, dans des maquettes parfois complexes et floues, apparaît une cause majeure de cette moins bonne perception de la profession.
Après une pause déjeuner ayant permis à chacun de débattre de la situation de « son » ESPE et de constater ainsi l’absence de cadre national, un premier atelier a permis d’ouvrir les débats sur les questions de recherche. Animé par Didier Cariou et Sylvain Doussot, ce moment a permis de montrer l’impasse d’un cloisonnement entre les vues théoriques et celles du terrain et que, se lancer dans une recherche n’est pas forcément un acte disciplinaire, mais constitue un moyen de s’interroger sur ses pratiques même si certains se questionneront sur le fait de savoir si un recherche réflexive est une « vraie » recherche. Les débats amènent vite à la nécessité d’aménager des plages horaires et des lieux de « séminaires de recherche » avec les problèmes de volumes disponibles et des statuts des personnels y ayant accès.
Jean-François Thémines et Christine Vergnolle-Mainar ont ensuite abordé le thème des écrits de recherche et l’absence de visibilité des mémoires produits et des ressources ayant permis de les réaliser. Les méthodes sont discutées, notamment la place de l’écriture collaborative qui présente un réel intérêt lorsqu’elle est menée entre pairs (même si le concours est individuel, le mémoire également et donc que l’on habitue assez peu à ce travail collectif). La posture fait également débat : y-a-t-il une attitude consistant à passer d’un écrit où l’on n’est pas impliqué à un écrit où l’on se veut davantage acteur et ce virage peut-il, doit-il correspondre à la transition entre M1 et M2 ?
Enfin, dans un troisième temps, nous avons eu l’occasion, avec Caroline Leininger-Frézal et Sylvain Genevois, de discuter des encadrants, de leurs statuts et de leur légitimité. Si l’encadrement est partagé, il convient de bien identifier le rôle de chacun, notamment lorsqu’il s’agit de ne pas confondre l’accompagnateur et l’évaluateur. Le candidat, nécessairement au centre des points de vue, doit se forger une opinion tenant à la fois compte des discours théoriques et de ceux du terrain sans que ce dernier, qui sera nécessairement plus important en volume sur l’ensemble de la carrière à venir, ne prenne le dessus sur la réflexion. Des pistes sont donc à baliser pour éviter une dissonance des discours qui nuirait à l’étudiant qui lui, a tout intérêt à apprendre à décrypter ces différents points de vue, pas nécessairement antinomiques même si ces mondes ont encore des efforts à faire pour dialoguer ensemble.
Une journée d’étude stimulante et riche de perspectives dont les conclusions détaillées et les pistes proposées seront prochainement présentées sur le site Didageo